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Théo Crassas nous a désormais accoutumés à sa forme poétique, à cette strophe ample et riche de reprises, de relances. Même lorsque son poème est une adresse au lecteur, il est aussi une ode, et pourquoi ne pas évoquer, dans un rapport aussi prudent que l'on voudra, Pindare et Hugo ( il partage avec ce dernier le déferlement).
Le poème de Théo Crassas est une incessante recréation verbale, visuelle, et qui brasse jusqu'à la substance des choses. Le désir engendre la roue des métaphores, à la mesure du monde: jubilation de l'analogie. Un des charmes les plus prenants de cette poésie est la contiguïté d'un langage que l'on dirait courant et des plus stupéfiantes images, quand il ne s'agit pas de formules dont l'impact et la résonance troublent longuement:
«Le sang de l'amour
produit en abondance
par le cœur mis à mort»
A la pointe de son élan, le verbe poétique devient visionnaire:
L'âme...son bec d'aigle et ses ailes de séraphin».
La pulsation précipitée de la fièvre lyrique volatilise le goût des prudents (ainsi de la femme à la bouche «pleine d'aras bleus»), la femme qui est chez Théo Crassas le point focal du monde, mais aussi son résumé, mais aussi sa multiple exaltation.
Si bien que l'érotisme devient une ascèse à travers laquelle toutes choses sont évaluées «au soleil extrême de ta hanche».
«Hommage de papillons» accomplit le portrait de la femme-monde, dans la perspective d'un platonisme sensuel, prophétique, décidément universel. (Théo Crassas, poursuivant une idée de la femme, décale , avec celle qu'il chante ici, descendante des Incas, le mythe grec des origines vers le Nouveau Monde).
C'est bien sur un ton majeur que Théo Crassas célèbre un univers où, dans un syncrétisme sans terme assigné, l'on peut «se parfumer d'essence du ciel».
Ce texte a été publié, en guise de préface, dans le recueil de Théo Crassas «Hommage de papillons», paru chez «Encres Vives» en avril 2004)
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