La Danseuse Andalouse
Les violons du Paradis
font goutter le sang d'Espagne
sur la terre féconde
de tes cheveux profus
où s'épanouit la Sainte Trinité
de Grenade, de Cordoue
et de Séville,
au centre de laquelle
officient les guitares
sous des nuées mystiques
de castagnettes enflammées,
dans la brise d'été
où les Sylphides balancent
leurs têtes d'Or
et les danseuses autour de toi,
en se baissant,
divinement balancent
leurs hanches charnues,
tout en agitant nerveusement
leurs éventails
à la tige d'ivoire!
La Vie imprime
à ton corps charmant
le Mouvement
comme le vent
à un essaim de nacelles!
Les talons de tes souliers
noirs
clavecinent sur le sol
de marbre blanc,
comme les lumières de Malaga
vocalisent dans la Nuit
du Sud,
et comme l'Andalousie
résonne et s'affine
et s'élance comme un épi
de seigle
dans le zéphyr luxueux!
Ton dos
est l'ombre fantastique
d'un fier boa!
Ton sein
est une transgression
de la Finitude
en la Mer de Causalité!
La douceur des oliviers
pénètre tes prunelles
où les nuages du crépuscule
s'allègent de leur poids
et montent dans l'atmosphère
comme des mongolfières
chérubiniques!
Ta bouche,
tenue par le bonheur
irraisonné,
chante l'azur
de la géante Pyrène
dont s'éprit Hercule,
et l'amour des faucons
ivres de liberté!
Ta face
est tendue par le Sourire
où les anges se pourchassent
dans leur quête
d'Incarnation!
Dans tes cheveux,
j'obtiens la puissance
d'un Prince Espagnol,
à la veille de son sacre,
à Tolède!
Ton nez
exprime la beauté
d'un Guadalquivir
qui coulerait du sein
d'une Déesse
et se jetterait
dans le Ciel!
La raie
que tu formes
en ta chevelure,
est le ruisseau de soie
où Narcisse se penche
pour se voir
en tant que fils
de l'Immaculée Conception!
Les traits
de ta figure d'Infante
ont la régularité
d'une rizière
ou d'une vigneraie!
Tes cheveux
sont des blés fleuris
noyés dans une Crue
vernale!
Ton haleine
est un bruissement de fiacres
allant et venant
dans la nuit aquatique
de Palma de Majorca,
une ouverture d'ailes
de Lune,
un Soleil heureux
d'adret,
le rose pâle
d'un églantier,
la fraîche rougeur
d'un corail de Tunis,
le friselis d'une harpe,
la suavité d'une flûte
traversière,
la mélodie des Océans!
Car tu es la caresse
d'un matin de Printemps
et la brume imperceptible
qui y est diffuse
et te couvre
d'un voile transparent,
beau comme le regret
d'un Fin Mystère
dont je suis chargé
de porter la connaissance
jusqu'aux confins inconnus
des Mondes,
et dans le royaume
des Aigles de pourpre
qui veulent nidifier
dans la Vérité!
LA MOSQUEE DE SATIN
EDITIONS ASSOCIATIVES CLAPAS
COLLECTION MIMESIS POIETIKE
MARS 2001