De L'Immortalité Des Amants
Assis sur le trône des délices,
tel le calife Haroun-al-Rachid
au zénith de sa puissance,
je contemple l'azur ultra-marin
de tes paupières qui sont le ciel
sous lequel fleurit le champ de violettes
de tes yeux pareils à l'oasis de Chiraz
dont l'herbe tendre je pais
comme un cheval persan,
harnaché de ta volupté royale,
mais bridé par ta coquetterie glorieuse
et frappé par le fer
de ta cruauté insigne,
ô vierge chirazie,
ô jouvencelle ispahanie,
toi, dont ni les Turques,
ni les Arabes ne lui sont comparables
en beauté et en séduction d'esprit!
Cependant, l'air parfumé
du musc de tes cheveux
emplit mon coeur d'une édénique fraîcheur
qui semble être
l'haleine même des houris du paradis
et le Verbe immatériel d'Allah,
tel qu'il sort de la bouche du Prophète,
que sur Lui soient la paix
du désert d'Arabie
et le silence!
Les poètes les plus pieux
ne disent-ils pas
que le monde est une amante?
Verse donc dans ma coupe
du moût de dattes,
afin que mon âme s'enchante
jusqu'à la dilatation
et à la joie,
jusqu'à ce qu'elle s'étreigne
et qu'elle s'embrase
comme le soleil de tes joues
enfièvre mon corps,
en donnant tout leur sens
à ces paroles du poète arabe:
«Puisse Dieu offrir à mes yeux
les pages lisses de tes joues
afin que je lise la beauté
sur ces chères lignes!
Ô belle gazelle ivre,
ne crains point la mort,
car, comme tous les amants,
nous sommes immortels!
L'AOUD DE LA LANGUEUR
RECUEIL INEDIT. JUIN 2004