Portrait de la Bien-Aimée Cachée

Ô Bien-Aimée
qui espères mon retour
à la terre virginale
de ton secret le plus intime,
ton nombril est un oeil de chatte
où se mirent mille pagodes d'or
et où bat le coeur de ton ventre,
large comme la vallée du Nil
ou comme la plaine du Gange!


Car ton ventre, paré du bijou sans prix
de ton pubis,
s'étend jusqu'aux extrémités
du monde
et enlace les reins de l'infini,
au-dessus de ta hanche,
clepsydre du temps de ma jouissance
et qui cache, sous son sable fuyant,
une vulve plus somptueuse que Babylone
ou que la capitale d'Akhenaton et de Néfertiti,
et aussi substantielle
que l'essence de l'être,
tant, que quand j'entre en elle,
je sens s'ouvrir les ailes d'Isis,
cette déesse d'Egypte
identifiée à la vache sacrée
du pays des pharaons
qui sont ses enfants
appelés et élus!



Quant à tes cuisses,
elles sont l'air frais et rare
de l'Atlas couvert de neige,
dont ton genou,
replié quand tu te donnes,
est la base!


Tes jambes sont
les mers de Maghreb-el Acsa,
arrosant les plages de tes pieds
dont les orteils sont
les voiles des navires de corail rouge,
ou des récifs calcaires
au milieu de l'océan!


Cependant, ton sein est
le blanc ramier
ou le clair tourtereau de mon âme
qui surprend, entre ses bras,
le battement de tes veines
et de tes artères
conduisant à la grotte sous-marine
qui recèle ton coeur sultan,
entouré de sa cour
de baleines-concubines
et de pages-dauphins!


Et j'en arrive à ta nuque,
pont de colombes
suspendu au-dessus de ton amour,
plus audacieuse qu'une larme,
plus téméraire qu'un sanglot!



Et d'admirer ton cou de tendre gazelle,
quant tu bois à une source de montagne
et que l'on voit,
à travers ta peau transparente,
l'eau couler dans les canaux du Generalife,
cet Eden grenadin!


Ton menton est un coing osmanli
ou une grenade du grenadier nain
de ma véranda,
d'où l'on voit la face de la lune,
tournée vers Allah,
et les merles enchantés
ainsi que des flûtes mozartiennes!


Ton nez est plus fin
que le nez de Mohamed II le Conquérant,
et pareil à celui d'une vierge turque
qui porte autour de sa délicate frimousse,
un léger voile de mousseline turquoise!


Ton front, enfin, est le soleil
de ton corps,
par une journée de printemps
où il pleut à verse,
bien que l'astre du jour brille
comme dans un rêve!

L'ASTRE SOMBRE DE LA MELANCOLIE

RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2004