La Brune Hiératique


Quand, pendant les chaudes
après-midi attiques,
je sommeille au soleil,
me viennent à la bouche
ces flamboyantes paroles
ainsi qu'un écho du futur,
ainsi que la splendeur du passé:
au milieu des petits êtres malfaisants
dont les piqûres sont horribles,
seule tu te dresses,
hiératique et brune,
ainsi qu'une statue
que je polis de mon désir,
toujours recommencé,
qui monte et qui descend
le long de ton corps,
se reposant aux vallons
mais tremblant
sur la pointe de ton triangle d'amour
ou sur les cimes de tes seins
comme un noir coursier
parti à la conquête
des sommets du Pinde!


Semblable à un aigle royal
aux grandes plumes déployées,
j'allume, bien qu'il fasse jour,
une torche à la base de ton cou
afin d'illuminer
l'émail blanc de ta face
d'un soleil
plus vrai que le soleil de nos yeux
ou que le Sirius de notre esprit!


Ainsi, couronné de lumière ultrasidérale,
je parviens à tes larges prunelles de jais,
pareilles aux prunelles vives
des statuettes sumériennes
et qui me regardent fixement,
cherchant à dénicher,
dans un coin obscur de mon âme,
le secret douloureux
qui fait de moi
un homme résolu à aimer
n'importe quand,
n'importe où,
à n'importe quel prix!


Parmi les amours mondaines
qui, malgré la douceur multicolore
du climat de l'Attique,
naissent et meurent aussitôt,
dans les ténèbres les plus épaisses
et les plus noires,
tu es l'amour unique,
l'amour grandiose de mon coeur
de conquérant maudit par les hommes
et béni par les dieux immortels!


Permets donc, ma douce Bien-Aimée,
que je te revête
d'une robe de roses blanches,
semblables aux dragées
de nos noces éternelles!


PONTS DE LIERRE ET DE VIGNE

RECUEIL INEDIT. MAI 2005