La Consommation des Siècles
Tu passes devant la terrasse de café
en tenant ton jupon
des deux mains,
de peur que le vent ne le soulève!
Qu'il le soulève donc
jusqu'à ton Olympe,
jusqu'à ton Ciel
où se baignent tes étoiles,
suaves comme le miel de l'Hymette
et douces comme la rivière de Garigliano,
l'antique Liris
qui séparait la Campanie du Latium!
Quel parfum dans les melons savoureux
de tes hanches
profondes comme la mer de Crète!
Et que dire des vagues
soulevées par le poisson rouge
de ton coeur
dans ta poitrine,
délectable comme le vin de Mytilène
dont je m'enivre
jusqu'à m'en soûler!
De par Aphrodite,
je n'ai jamais connu
pareil soûl
et jamais la durée de la volupté
ne fut aussi longue,
plus longue même
que les neuf nuits consécutives
que Zeus passa dans les bras de Mnémosyne
et durant lesquelles
les Neuf Muses furent engendrées!
Et quel corps robuste
que le tien!
On dirait que ce n'est pas une mortelle
qui t'a nourrie de son lait
quand tu es née,
mais la chèvre Amalthée elle-même,
la même qui nourrit le Dieu Suprême
dans son antre idéen!
Cette fois vraiment
je visiterai tous tes orifices,
comme dans un moment
d'adieu ultime aux montagnes,
aux vallées, aux plaines, aux lagunes
et aux mers de la Grèce!
Comme un Dieu,
je te pénétrerai toute
et quand je te tiendrai
à ma merci,
j'abuserai de ta jeunesse immortelle
afin que tu sois libérée
pour toujours
du souci du qu'en dira-t-on
et de l'obsession
des laborieux lendemains blêmes!
Ô ma petite femme
ronde de partout,
chaque fois que, vainqueur,
j'entre en toi,
je crois entendre le corps
de la vieille Hellade
craquer de toutes parts
ainsi que du vieux bois
ou qu'un antique corset
et je perçois même des soupirs
venant des fondrières
et des ravins du vieux pays montagneux
des Danaens,
comme si la consommation des siècles
était aux portes de l'Europe!
Mais je sais que celle-ci
n'arrivera
que quand les prêtres,
suivis de leurs ouailles,
abjureront leur foi impie
en la démesure de l'Illusion,
et en l'Hybris du Néant!
C?UR DE BACCHUS
RECUEIL INEDIT. AOUT 2005