Les Houris
(Etude)
Les cheveux des Houris
sont semblables
à des enchaînements
de faits d’Or,
à des chaînes
nous reliant à l’azur,
à des avancées victorieuses,
par des chemins détournés,
vers l’Infini,
à des doux moutonnements
de collines romaines
damasquinées de Soleil,
à des sublimes oliveraies
crétoises,
à des entrelacs de volutes
d’opium,
et à des tourbillons
de flammes jalouses!
Leurs yeux sont des fontaines
vénitiennes,
leurs seins sont des torrents
de manne céleste
et leurs torses
des rivières étincelantes
dans le Grand Vide!
Semblables à des chevaux
voluptueux,
elles ont des courbes parfaites
de Hanches,
ces accords d’harmonie
hyperterrestre,
cette palpitation
de l’Être,
cette musique de la Nature,
ce rythme des racines
de la Vie,
cette Danse des Idées,
ces couleurs des Ethers,
ce chant des phénomènes,
ce sacrifice
à la bonté du Monde,
cette Arche du Salut,
ce tangage paradisiaque,
cette Essence des montagnes,
cette substance des cavernes
souterraines,
cette aérienne fragilité,
cette puissance aphrodisiaque,
cette souplesse de biche,
cette robustesse de louve,
ce piment de la Raison
incendiée,
cette Satisfaction,
aussi enivrante
que primordiale,
des Sens transcendés,
ces hymnes charnels,
ce bel art
du langage corporel,
né du Cœur,
ces bombes symétriques
du Désir,
ces branches acclamatrices
de l’impérieux Plaisir,
ces mers
où l’on entend Dieu,
ces muscles vainqueurs
élastiques
comme les serpents
qui se balancent
tout en se tordant
impitoyablement,
à la beauté plastique
comme le sable mouvant
du Désert,
tendres
comme le Sable
des plages de l’océan
Indien,
ces pains nourriciers
de la force,
ces raisins de la Maturité,
ces vendanges,
divinement abondantes,
de nectar,
ces champs de canne
à sucre,
ces gâteaux de miel
nuptiaux,
ce haschich des ascètes,
ces coupoles
parées de roses,
ces voûtes de nuées
du crépuscule,
éblouies par le Soleil,
ces diamants ardents
assassins,
ces Etoiles splendides
tournant dans la tête brûlante
des poètes
comme dans un ciel
à moitié embrasé d’aurore,
ces pétales
de fleurs d’amandier,
ces gazelles
se désaltérant
dans une source cristalline,
ces tigres
se baignant
dans les affluents du Gange,
ces buffles
se dirigeant
vers les points d’eau
de la plaine de l’Hindoustan,
ces pâturages himalayens
où se prélassent les pastourelles,
ces vertes Oasis
de l’Attente comblée,
ces Vergers
de l’Espérance réalisée,
ces ronds tapis
de caresses,
ces balles de marbre,
ces vasques de neige
des palais enchantés
d’Orient,
aux dalles lisses,
jonchées de Palmes,
ces Mères du Bronze
et de tous les métaux
précieux,
ces mosquées illuminées
de l’Âme,
ces églises de la Résurrection
enlacées de feux
d’allégresse
où la Matière est suscitée
par l’Esprit,
ces jasmins de l’Amour,
tant célébrés par les vaillants,
embrassant
l’Arbre rouge
géniteur de métamorphoses
de nymphes,
ces nénuphars
de la Contemplation,
ces voiles
de nef, chargée d’automnes,
incrustée
dans l’Eternité,
ces avenues de roseaux,
ces révélations
de coquillages de nacre
où sont contenues
les Bénédictions,
comme dans une amande
le Bonheur,
ce tissu arachnéen
de l’universelle Mathématique,
ces Pleines Lunes
du rêve
se reflétant
dans les puits occultes
de Rubis,
cette pluie de fleurs
de safran du Cachemire,
ces Sphinx de la Paix,
ces écrins
de perles merveilleuses,
ces guitares
résonnant du sang
des mystères de la Terre,
et, enfin,
cet incomparable Etendard
de Joie
agité
dans la brise
venant des jardins d’émeraudes,
par les Vierges rieuses
célébrant le Triomphe
de leurs Corps superbes!
LA GRANDE DEESSE
RECUEIL INEDIT. DU 12 OCTOBRE 1996 AU 11 JANVIER 1997