Les Roses de la Transcendance


La violence de l’émoi
qui me saisissait,
m’accablant presque
chaque fois que tu t’approchais
de moi,
était à la mesure
du puissant aimant
que constituait ta peau
fraîche comme l’eau
des quatre fleuves de l’Eden,
unie comme le beurre
d’une vache d’Aquitaine
et parfumée comme un pain
à peine sorti
du four de l’Espérance!


Ainsi ta sève
d’arbre fruitier
et ton humus
de terre fertile
m’enseignaient dès le commencement
l’indicible beauté
du printemps provençal,
la jeunesse de l’Etoile azurée,
lieu prédestiné,
pacifiant
comme ton action bienfaisante,
de cette Chair
pareille à une porcherie
sentant la suif des porcelets,
ou à une bergerie
gardée par des chiens blancs
ou à une écurie
chaude de l’haleine
des cavales désirantes,
l’abondance narcissique
du corps des jeunes femmes
pareil à une galerie
de glaces,
la nécessité
de la nourriture terrestre
en tant qu’elle est
la seule qui rend possible
l’existence de l’Esprit,
le refus de l’Abstinence
conçue souvent
comme un acte de mépris
envers les forces vives
de la Nature
et un acte d’orgueil
grotesque,
car fondé exclusivement
sur une grasse illusion
des sens
travestie en désespérance
de vivre,
et, enfin, l’Ascèse
voulue comme un acte d’Amour
pareil à une broderie de dame
ou à une pièce de clavecin
du Padre Soler!


Pendant toutes
les années obscures
où je me déchirais
entre fureur de connaître
et douceur d’aimer,
ton grand sein plantureux
comme une vigne
me servait de fil d’Ariane
dans le labyrinthe
où je m’étais dévoyé
et me permit d’affronter
le minotaure des sens
qui peuvent aveugler
comme illuminer!


Ton front
large et bombé
était le reflet de mon coeur
qui, fait unique
dans la contemporaine
galanterie,
suintait la Pensée
sur ta face claire!


Tes yeux clos
étaient ta prière intérieure
pour la Résurrection
par le Plaisir!


Ta vulve
que tu balançais
rythmiquement, avec harmonie,
obstinément,
était pour moi
le Mystère Féminin
où voluptueusement
s’entrouvraient
les roses de la Transcendance!


Et ta chevelure brune
courant librement
sur tes épaules
comme un impala,
fut l’étincelle
qui donna la flamme
de ma libération finale!


C’est ainsi
que je suis devenu
un flamine de Vénus,
mère d’Eros!
Et depuis,
j’allume tout seul
les torches
destinées au service
de la Déesse!


FLEUVES DE POURPRE

ENCRES VIVES. COLL. LIEUX. OCTOBRE 2000