L’Epanchement


Avec l’ivresse que me donne ton Corps,
j’ai besoin de m’épancher
dans la Pensée de la Totalité
comme l’Amazone s’épanche
dans l’Atlantique tumultueux,
comme le Rhône se répand
dans la Camargue salifère,
comme la Yamuna limoneuse
arrose le Bengale
et se jette, bienheureuse,
dans l’Océan Indien,
comme le Nil s’engloutit
dans la Méditerranée bleue,
comme le Tibre donne à Rome
le baptême de l’Eternité,
comme la Seine s’inscrit
dans les murs de Paris,
à travers ses ponts
du Triomphe majestueux,
comme le Rhin emporte Cologne
vers son destin de vigneraie latine,
comme la Volga paresse
entre les plaines fertiles de Russie
et, sans se presser, s’étire
jusqu’à la Caspienne,
comme le Mississipi chante
jusqu’en Louisiane,
portant le laurier
de Poète-Père,
comme l’Amour s’apaise
dans le Pacifique,
comme l’Orénoque porte le Venezuela
dans ses bras d’or,
comme les Andes
conquièrent l’Ether
et deviennent divines,
comme, enfin, ta chevelure se fond
dans le Choeur des Anges
et ta croupe, pareille à une musique
féline,
constelle le firmament
de sa courbe aiguë!


Je suis le Corsaire nu
dont tu es la Nef flibustière!
Je suis le coursier aguerri
dont tu es la cavalière adroite!


Je suis l’île dépourvue de sources
à qui tu portes comme un bateau
de l’eau douce
dans des fûts à vin!


Tu es la Madone
penchée sur mon chevet
d’ascète!


Tu es l’Amante
accolée à ma Nuit!
Tu es le Temple
où j’officie, de jour et de nuit!


Je suis le squelette
à qui tu offres la chair,
le ballon dont tu es
l’hélium qui le remplit!


Je suis le Prisonnier
dont tu es
la Liberté!


Je suis le Vent du Sud
qui souffle dans tes cheveux
la Pléthore et la Gloire
et rend ton OEil suave
comme une Demi-Lune!


TROMPETTES ANGELIQUES

EDITIONS ASSOCIATIVES CLAPAS. AOUT 2001