La Céleste Pérégrination
Je suis un aigle
qui plane dans l’air haut,
beau et rare
d’un après-midi de printemps,
entre les étoiles
d’où jaillit le Pégase bleu
portant Persée et Andromède,
entre les galaxies
composées de torches
allumées par les mazdéens
pyrolâtres,
entre les nues
d’où Tirésias
tire la force prophétique,
parmi les cimes des platanes
sous lesquels les Sages
cyrénéens
déploient les sciences magiques
de la Volupté,
parmi les crêtes des pins
où les croyants
suspendent leurs offrandes
à Adonis ressuscité,
au-dessus des montagnes
où se confirme la valeur
des satyres
et où les bacchantes
s’ornent dans leur pieux délire
de serpents,
au-dessus des ravins
ombrés de fleurs,
au-dessus des gorges
que franchissent rythmiquement
les cavales puissantes,
au-dessus des doux coteaux
de vigne nourricière,
au-dessus des vallons
où les vaches précieuses à l’homme
se prosternent devant la Terre
fertile
pour demander une engeance
heureuse,
au-dessus des plaines
d’où les peupliers
s’élancent dans l’azur
comme des flammes
de brasiers,
au-dessus des forêts
enchantées par les yeux divins
des biches rédemptrices,
au-dessus des étangs
où secrètement
chantent les crapauds
mystiques,
au-dessus des sources
où se joue
la vie des nymphes,
au-dessus des fleuves
suivant la voie rapide
de la Liberté
de leurs haleines
de flûtes,
au-dessus des jardins
où les violettes audacieusement
s’initient aux mystères
du Printemps,
au-dessus des péninsules
dont le sang surabondant
fuse dans les demeures
chtoniennes,
au-dessus des villes
où les choeurs tragiques
illustrent la nature
des dieux,
au-dessus des ports
ceints des cheveux
des Océanides,
au-dessus de la mer musicienne
d’où mélodieusement
naquit Aphrodite
à la peau harmonieuse
d’ambre!
Pendant ma céleste
pérégrination,
parfumée par l’astre de feu
et les herbes de la terre,
je communie dans l’ambroisie,
essence de l’univers,
origine et fin
de l’homme,
son éblouissement,
son recueillement,
son action,
sa contemplation,
à la fois sa connaissance
et son Amour!
PLAISIR D'ACANTHEL
EDITIONS ASSOCIATIVES CLAPAS. JUILLET 1999