À Maria Polydouri, Poétesse Grecque
Telle un Sirius porté par l'Idéal
et laissant derrière lui
une traînée de météores du souffre,
tu traversas fulguramment
le firmament, navigable
en sa tendre luminosité nocturne,
de l'Hellade!
C'est que tu ne fus qu'un écho,
réentendu après un silence de millénaires,
du mythe antique et vénérable
en son intime sagesse,
et selon lequel est vraiment amoureuse
la femme qui se considère
n'être née que pour éclairer,
des astres de ses prunelles,
le chemin de l'homme supérieur
qui est cher à son coeur!
Seule de toutes les femmes de ton temps,
tu te sacrifias sur l'autel
de l'Amour unique et absolue
parce qu'un matin, un homme,
un poète comme toi,
arrêta sur toi un regard ébloui
qui semblait promettre
des aubes d'or d'amour plénière
et d'Eros éternel!
Seule toi,
la fille dorienne du Péloponnèse,
tu aimas,
non en vue de la satisfaction
d'un sentiment pauvrement individuel,
mais pour entrer,
comme une nef pavoisée
et illuminée de dix mille flambeaux
allumés à la flamme
du volcan de l'Etna
dans le vaste port
du sacrifice au Dieu,
à la fois céleste et infernal,
chtonien et ouranien,
de la splendeur dionysiaque
pour qui tant de vierges
et tant de jeunes gens
se sont immolés
avec le sourire aux lèvres,
ne regrettant que l'aube rose
de leur naissance prédestinée!
Oui, tu bus d'un seul trait,
et jusqu'à la lie,
le doux calice
de l'amertume dont frappa ton âme
le singulier, l'étrange destin du poète
qui, à ton amour bienheureuse,
ô combien fine,
et de quelle archaïque innocence,
préféra une mort
restée inoubliable
et accéléra ainsi
ta propre fin,
devenue inévitable!
Oui, tu fus un songe
d'aurore d'Août,
dans un siècle accablé de vilains usages
et lourd de métamorphoses
qui toutes tendaient
à défier les lois de l'Amour,
édictées en des temps immémoriaux
par la sublime Aphrodite
la Cythérée!
LA CITE DE LA LUXURE
EDITIONS ENCRES VIVES. FEVRIER 2005