Ode à la Nymphe Pomone
Ô toi qui, fuyant les forêts denses
comme des cathédrales tropicales
et les montagnes escarpées
où la neige ne fond jamais,
oui, toi qui, fuyant les forêts touffues
et les fleuves aux eaux bouillonnantes,
n’aimes que la douce campagne
et les jardins porteurs
de beaux arbres fruitiers,
ne ferme pas, ainsi qu’une nymphe égoïste,
la porte de ton verger,
ceint de hautes murailles blanches,
à l’amoureux qui s’y attarde
jusqu’à une heure avancée de la nuit,
espérant de toi un propos câlin
ou la caresse de tes prunelles
où les escarboucles l’emportent
sur les émeraudes!
De grâce, n’enferme pas
derrière des grilles épaisses
la rose de la connaissance
et la science de la volupté
qui t’ont été échues
de par ta nature,
à la fois de jeune femme
et de déesse immortelle!
Ô toi, dont tant de prétendants
briguent la main,
ouvre les canaux de ton verger
à la contemplation de tes amants
et laisse pénétrer jusqu’à ton pavillon
le regard du trouvère
qui, tel un rossignol de Chiraz
té célèbre par des chansons de jasmins
où l’espérance est plus forte
que le désespoir!
Or, de très loin,
je préfère, aux unions monstrueuses
où l’humanité actuelle excelle,
même une inimitié éventuelle,
mais venant de toi!
Oui, je préfère aimer une fée
plutôt que tirer le char
d’une maîtresse qui se vante
d’être ordinaire,
mais qui, en réalité, n’est qu’un succube
aux formes hideuses!
Oui, plutôt une Annabel Lee morte
qu’un anophèle vivant,
et buvant mon sang!
AME DE COCOTIER
RECUEIL INEDIT. DU 29 MAI AU 6 JUIN 2007