L’Aube Vernale

De par la fête sévillane
des coquelicots enflammés,
de par le ballet langoureux
des roses généreuses,
de par la musique radieuse
du coeur victorieux,
de par la valse polyphonique
des marguerites multiples,
de par la liberté
des jacinthes fascinantes,
de par l’harmonie soyeuse
de l’aube vernale,
je me baptise
selon le dogme du Printemps
et son rite mystique!


Et j’immerge
dans la pluie de pollen
de Mai,
comme un esprit immanent
à cheval sur la Matière
pénètre dans la mer
de la Transcendance,
parmi les flèches
des oeillets de sang,
les cris flamboyants
des genêts,
les jardins aux statues de marbre
de Flore
dont les hanches
sont jalousées par les jasmins
et adorées par les myrtes,
les colombes d’Eryx,
les flamants d’Andalousie,
les hérons du pays de Galles,
les cygnes d’Angleterre,
les taures aux seins boulimiques
pareils à des lacs profonds
de forme agréable,
que les taureaux sentent de loin
et blessent de leurs yeux
amoureux,
les tigres
aux vastes reins lascifs
qui se balancent lentement,
les cavales couchées
aux jambes repliées,
s’offrant au règne d’Aphrodite
dans le calme merveilleux
d’Eros,
les amantes-mères
prodiguant la chaude mollesse
de leur giron rose
porté par l’onde de félicité
émanant du centre
du Monde,
et, enfin, les clartés
où les Heures
passent la part la plus précieuse
de leur voyage éternel,
du chant des oiseaux
prophétique
au chant des parfums
hiératique
et à celui, démiurgique,
des feuilles de l’Arbre
de la Liberté!


Et l’aube
de planter dans le ciel
le Soleil comme une bannière,
face à la Lune,
encore éclatante
mais rapidement pâlissante,
au milieu des nuages
sculptés par la Gloire!


Ainsi,
à chaque rotation de la Terre,
le Soleil connaît le Rêve
de son propre Sacre!
Car les liens les unissant
sont de pur
Amour!

DUNES DE BRAISE

EDITIONS ASSOCIATIVES CLAPAS. DECEMBRE 1999