Le Champ de Bataille


je trépignais d’irrésistible ardeur
et d’invincible élan
pour Dionysos et Aphrodite,
ce Couple sacré
qui engendra Priape,
jeune dieu admiré
aussi bien des courtisanes athéniennes
que romaines!


Et si effrénée était ma fougue
que les pavés de la Ville
résonnaient de mes cris de guerre,
de la clameur de mon cor
et, surtout, de ma parole paroxystique,
haute comme le Ciel!


Aucune esbroufe alcibiadesque
et aucune jactance franque
n’entraient en ligne de compte
dans cette mienne action
qui découlait seulement
de ma foi en l’omnipotence du Logos
et de ma doctrine
qui porte sur l’importance du poète
en tant que lieutenant sur terre
des forces surnaturelles et magiques,
sorte de Pape ou de Calife,
mais sans armée ni cour!


Oui, j’affirmais que le troubadour
est un prince sans pouvoir temporel,
un fakir métaphysicien!


Et je poursuivais à cheval
et à bride abattue
les ennemis du plaisir,
c’est-à-dire celles et ceux
qui ne croyaient ni en Astarté
ni en Vénus ni en la Lune
et qui, en plus, n’aimaient guère
être consolés de leur maux
par un vieux vin de Malvoisie,
tiré à pleines outres!


Or, Aphrodite et Dionysos
ou Cypris et Bacchos
sont mes Souverains,
ceux qui galvanisèrent ma jeunesse
quasi-garibaldienne
et qui, une fois mon éducation achevée,
me lancèrent dans le champ de bataille
qu’est la vie sur terre
et où s’affrontent,
en vue d’un terrible carnage,
les barbares des ténèbres
de l’Hadès
et les chevaliers du soleil
armés de pied en cap!


CHEVALIERS DU SOLEIL

RECUEIL INEDIT. DU 10 AU 19 JUILLET 2007