La Bien-Aimée aux Doigts d’Or


Ô Bien-Aimée aux doigts d’or,
jouir du plaisir de vivre,
c’est pour moi pouvoir contempler
en toute quiétude
et sans craindre une descente aux Enfers,
le noir de tes yeux,
comme s’il était une source
qu’un sombre laurier ombragerait
et où des houris aux prunelles noires
nageraient ainsi que des dauphins!


Jouir du plaisir d’exister,
c’est aussi reposer sur un lit de roses,
auprès du lac de Trasimène
et rêver à la bataille de Cannes
où Hannibal défit les Romains
ou à celle des Champs Catalauniques
où les Romains battirent à plate couture
les Huns d’Attila!


Mais jouir, se délecter, s’épanouir,
c’est surtout contempler ta hanche
dont les proportions énormes
sont pour toi, comme pour une dame d’Afrique
ou du Bengale,
un sujet de fierté
et pour moi une cause essentielle
de joie et d’allégresse!


Inestimable est, en réalité,
le Bien que constitue
l’Amour sans prix des sens,
tenu pour le Souverain Bien
par les philosophes de Cyrène!


Car t’aimer, chère angellette,
c’est par là même
rendre hommage à ce brillant esprit
qui, avant Epicure,
il y a de cela deux millénaires et demi,
fondait ou instituait
l’inaliénable droit
des hommes et des femmes
à la volupté
consciente d’elle-même
et qui n’est pas seulement
la satisfaction de la si légitime passion
d’étreindre et de caresser,
mais aussi une thérapeutique
ou une maïeutique
fondant une ascèse
qui repose sur la Connaissance,
c’est-à-dire sur une haute sagesse
et sur une volonté toute entière tendue,
ainsi qu’un arc bandé,
vers le but noble
consistant à couronner
une vie heureuse!


PORTE DE CINNAMOME

RECUEIL INEDIT. DU 17 AU 24 AOUT 2007