À Une Courtisane Parfumée


Si tu te frottes de parfums,
c’est afin d’être agréable à Aphrodite,
la déesse toujours coquette,
car toujours amoureuse,
en permanence éprise de quelqu’un
ou de quelque chose!


Et si tu te balances
à coeur joie,
quand tu passes devant moi,
c’est afin que, en tant qu’adepte de la déesse,
je compose une cantate à ta gloire
ou un opéra
où tu serais la comtesse de Toulouse
et moi le troubadour,
chantre de ton corps merveilleux
et affidé à la secte
des antiques courtisanes
et de leurs héritières,
les courtisanes indiennes
ou nipponnes d’aujourd’hui!


Or, ta démarche chaloupée
abolit en moi tout soupçon à ton égard
et ôte à ma conscience
toute pensée d’un déplaisir quelconque
causé par toi
et subi par moi!


Car tes fesses s’entretiennent
avec mes sens agréablement
comme avec les invités d’un banquet,
d’un banquet auquel Vénus présiderait
et où Hébé, l’amante
éternellement adolescente d’Héraclès,
serait l’échanson
et les Muses les musiciennes
et les danseuses!


Tes cuisses nues sont les Caryatides
du temple de ta hanche
qu’elles soutiennent de leur robustesse
et de leur fierté!


Quant à tes jambes lisses,
blanches et élégantes,
en se mouvant, elles accouchent
de paons bleus et de faisans dorés!


Tes pieds aériens, en se posant
sur le sol de marbre,
soulèvent des nuages de gemmes
et une poussière de perles
que délicatement je ramasse
et dont je m’asperge
en te lançant des signes d’intelligence
manifestant mon extrême plaisir!


Assis présentement devant une église
aux arcades byzantines,
je rêve à ton infinie beauté
qui est aussi ton illimitée bonté,
tout au moins relativement à moi
et à mes sensations
par lesquelles je te juge
et te trouve conforme
à l’idée que je me fais
de la beauté,
et qui est singulière et unique,
comme le sont tout homme et toute femme
sur cette terre!


PORTE DE CINNAMOME

RECUEIL INEDIT. DU 17 AU 24 AOUT 2007