L’Invitation au Repos


Quand je te vois passer
sur le chemin de ta gloire,
ma parole jaillit
comme le miel qui coule
des alvéoles d’une ruche
que l’on vient d’enlever
à ses hôtesses les abeilles,
après l’avoir enfumée!


Quand je vois tes fesses
se balancer avec tant d’affirmation,
je crois entendre Mystis,
la nourrice de Dionysos,
faire retentir le double bronze
d’une cymbale semblable par le son
au gong qui fait taire les sots
et qui invite à se recueillir
les âmes supérieures!


Or, quand je contemple
l’ineffable oscillation de tes hanches,
si belles qu’à en parler
c’est les chanter,
je crois entendre les Corybantes
entrechoquer leurs épées
et frapper leurs boucliers
par coups alternés
en faisant virevolter le fer des marteaux
afin de protéger par ce vacarme
le secret du caveau souterrain
où se trouve Bacchus encore enfant,
fuyant le danger
que fait peser sur sa vie même
Héra, si cruelle pour ce fils bâtard
de Zeus et de Sémélé!


Car tu es susciteuse d’images d’action
plutôt que d’oisiveté,
tant ta nature est héroïque
et, partant, violente!


Et moi qui tant aime l’abandon,
voire l’immobilité,
j’affectionne, pourtant,
le tien mouvement,
extravagant comme tes toilettes
où la femme en toi triomphe!


Oui, quand je rêve à toi
qui es si paisible, si naïve,
malgré une exubérance et une espièglerie
toutes méridionales,
je me sens comme une allée d’oliviers
qui s’offrent au soleil de la Morée
ou comme un doux palmier
chargé de dattes
qui se dresse sur un havre de Béotie
ou comme un tamaris fin
au bord de la mer d’Eubée
ou comme un coursier tout blanc
couché dans le foin
d’une prairie de Chypre!


Ce que j’aime en toi
et en ton fantasque esprit,
c’est, surtout, cette invitation permanente
au repos
qui est l’apanage de ton mouvement
et qui s’obtient seulement
après une violente action!


LE DIVAN D'OR

RECUEIL INEDIT. DU 30 SEPTEMBRE AU 8 OCTOBRE 2007