Jésus, le Rossignol de Palestine

Parmi tant d'oiseaux
de bon augure
qui dansent follement
mais sans bruit,
comme si le silence du bonheur
était la seule destinée
qui leur fût autorisée,
le saint rossignol d'amour
chante dans les jardins de Judée
et dans les yeux des amoureux
purifiés au feu de la passion
comme l'argent
et passés au creuset
comme l'or!


Mais, si les exaltés,
ceux qui disent oui à la vie,
l'appellent rossignol,
les pacifiques voient en lui
un Maître de sagesse,
les belliqueux un Despote agressif
contempteur des femmes,
les cupides le veau d'or
fait Prophète
et les prêtres un Fils de Dieu,
Dieu Lui-Même,
né sans copulation
d'une femme
vidée de toute substance féminine
et vierge de tout désir!


Seule la version
des exaltés de la volonté
est la bonne, la juste,
celle de la plus tendre,
de la plus affectueuse,
de la supérieure amour!


Oui, Jésus fut le rossignol de Palestine,
le boulboul de l'Orient,
une incarnation baroque
d'Apollon l'Archer, le Citharède
et le Sauveur,
un frère du gracieux Hermès,
un avatar de Vishnou le Préservateur,
un cousin de Krishna,
le Dieu dont sont éprises
toutes les bergères,
un jumeau de Kama-Eros-Cupidon,
Fils d'Aphrodite-Ashtart!


L'Amour est une fleur écarlate
dans un champ printanier qui embaume,
voilà en substance
l'enseignement de l'Enchanteur de Galilée
dont il faut chercher les gemmes
dans les Livres tenus pour hérétiques
par les prêtres
qui craignent un mouvement populaire
emportant le Haut Sacerdoce
et avec lui tout vestige
d'Etat impérial!


Oui, Marie fut une douce villageoise
et Joseph un charpentier zélé
et de leurs oeuvres un fils est né
qui un jour serait
un grand Maître de rhétorique
ayant pour toute monture un âne,
un merveilleux sophiste,
un extraordinaire diseur de paradoxes
et un médecin de l'âme,
arrachant les hommes à l'ignorance
en leur apportant l'intelligence
de la Musique
fondée sur l'Universelle Amour
dont il donna les preuves
dans sa vie même,
toute entière remplie
de l'affection qu'il portait
à Marie de Magdala!

FLEURS DE SOLSTICE

RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2005