Hymne à la Divine Courtisane
Allant à contre-courant
de la brutale cupidité de notre temps fade,
ton insigne beauté,
si célèbre qu'il fallu trois nuits
pour la concevoir,
ta beauté, disais-je,
occupe une place royale
dans l'empire de gloire
d'Alexandre-Apollon-Soleil!
C'est à juste titre
que la Déesse Aphrodite
te désigna comme la première par la grâce
d'entre ses filles!
Car les fruits fauves et dorés
de la connaissance
épanouis en toi
amplement justifient
et entièrement légitiment
ce tien privilège
qui consiste à être
la personnification de la Beauté
à travers les âges
et les nations,
surtout les nations
dont la civilisation est
une fleur rare,
à ton image,
ô divine courtisane,
ô majestueuse cocotte,
ô sublime concubine,
ô Laïs, ô Phryné,
ô Aspasie!
Et l'on me montre du doigt,
moi, le plus romanesque
des lyriques aèdes,
parce que j'aurais fait perdre la tête,
par mes éloges ininterrompus
de la femme,
à la foule des mesquins
et des petits!
Or, mon intention ne fut jamais
d'émoustiller et d'exciter
les sens du vulgaire,
mais de refaire le monde
en remettant les pendules
à l'heure du triomphe féminin!
C'est que ma conception de l'Univers,
et de la place qu'occupe en lui
la volupté,
est la même que la conception
que se faisaient de ces choses
les brillants Sumériens
d'heureuse mémoire
et de faste souvenance!
Oui, je voudrais métamorphoser
l'homme et la femme modernes
en des fils et des filles
de l'antique Sumer,
me conformant en cela
à leurs aspirations
les plus secrètes,
celles que dès le commencement
j'ai pressenties!
Oui, la Divinité a eu raison
de faire présent à toi,
dès ta naissance,
d'une amphore pleine,
d'une coupe remplie
à ras bord,
oui, à toi qui es la substance même
de ma vie
et le terme assigné
à mes travaux d'esprit!
Vers-moi à boire,
ainsi qu'une fine vapeur d'étuve
ou que la fumée
parfumée à la rose
d'un narghilé,
le vin capiteux du plaisir
dont tu es la babylonienne Reine,
Sémiramis la Grande!
MERS DE VOLUPTE
RECUEIL INEDIT. DECEMBRE 2005