À la Concubine Couronnée de Roses


Je serai la brise printanière
qui caressera tes tendres joues antigoniennes,
célébrées par Sophocle,
et le clair ruisseau
qui te baisera sur la bouche!


Je serai la rougeur de l'aurore
sur ton front nacré,
incendié par les feux renouvelés du soleil
purifié dans la mer!


Et tu seras une nue seigneuriale,
pareille à un mimosa en fleurs
volant dans le ciel du crépuscule!


Or, tu t'enrouleras
autour de mon tronc
de platane philosophique,
ainsi qu'une liane odorante
ou qu'un lierre rampant
qui me communiquera la manie
des Bacchantes
ou qu'une vigne grimpante
qui, en tant que fille de Bacchus,
m'abreuvera d'ivresse dionysiaque!


Il ne fait aucun doute
qu'au milieu d'une pompe alexandrine
et dans une symbolique païenne,
tu serais la Reine des Champs Elyséens
ou l'immortelle Calypso
retirée sur son île fortunée
et qui s'éprendrait de moi
comme d'un autre Ulysse,
d'un glorieux naufragé,
chanté par le Poète!


Et d'après la doctrine
prévalant chez les Juifs,
tu serais la brune de Salomon
ou la Souveraine de Saba
visitant la Terre Promise
à la tête d'une caravane de lions roux
porteurs d'or et de rubis
pour le Roi de Judée
et de bâtons d'encens
destinés au Temple Hiérosolomytain!


Oui, tu serais celle
qui langoureusement se balancerait
sous mes prunelles éblouies,
cependant que ton immense chapeau de paille
de fille des îles
te rafraîchirait de son ombre merveilleuse,
quoique artificielle!


Oui, si tu vivais en des temps meilleurs,
tu serais une courtisane de Paphos
ou de Corinthe,
officiant dans le sanctuaire de Cypris!


Et tu m'aimerais voluptueusement et fidèlement,
ainsi qu'une concubine syriaque,
couronnée de roses!


VASE A IVRESSE

RECUEIL INEDIT. JANVIER 2006