Nouzhatou-Zaman


Ô Nouzhatou-Zaman,
volupté du temps qui passe,
on a raison de te donner ce nom,
puisque c’est toi qui présides
au plaisir que ressent
le volontiers rêveur et poète Bédouin
devant l’instant présent
dont il jouit comme d’une vapeur d’opium,
ou d’affion,
comme disent les Turcs!


Car cette vapeur d’opium
lui suggère de façon poignante
sa si désirable Bien-Aimée
à la nuque de gazelle,
au cou de houri,
à la chevelure à étages
de colline verdoyante,
au visage pareil à une mer sans vagues,
au ventre semblable à la vallée de Damas
ou à la plaine de la Bekaa,
aux cuisses lourdes,
mais élastiques et fermes
et à la croupe rouge et blanche
comme une pastèque,
rouge par son anus
et blanche par la peau de ses fesses
plus suaves qu’un gâteau de miel de Beyrouth
et parfumées au baume du Pérou!


Comment expliquer
la jouissance souveraine
que tire l’Oriental
de l’instant fugace,
autrement que par le désir
qu’il ressent pour les seins
de sa Bien-Aimée,
plus douce que le sucre candi
et plus embaumée
que le styrax
ou l’oliban du Yémen?


Oui, le ménestrel arabe
ou persan,
ainsi que le trouvère
qu’il met en musique,
vainquent le Temps,
si effrayant et tant traître
aux yeux des Mécréants
et, pourtant, aussi doux
que la plus douce des Aimées!


CARESSES D'ANEMONES

RECUEIL INEDIT. DU 21 AU 28 FEVRIER 2008