Du Balancement des Femmes


Ô femme bénie des Chérubins,
quand tu évolues paresseusement
parmi les roses du jardin,
rose toi-même
et des plus joufflues,
des plus épanouies
et des plus parfumées,
oui, quand tu te promènes insouciante
au milieu des fleurs,
en te balançant avec volupté
ainsi qu’une barque rouge
aux avirons d’or
dans la houle de saphirs,
ou comme un vaisseau de long cours
qui roule bord sur bord
dans l’océan de l’Amour,
ou comme une nue
qui tourne dans le ciel printanier,
ou ainsi qu’une cloche qui bat
dans la pagode de ma Déesse,
ou que la pendule de mon coeur,
ou qu’une escarpolette d’Infante
qui va et vient,
ou, enfin, comme le cou de cet oiseau érotique
qu’on appelle le torcol,
oui, quand tu te balances
ainsi qu’une courtisane
savante dans l’art amoureux,
c’est comme si on écoutait religieusement
le gazouillis, le pépiement,
le chant, la musique des oiseaux,
et c’est comme si trois grands bardes
élevaient chacun de son côté
une ode à la divine Miséricorde
et à la supranaturelle Compassion!


Car, incontestablement,
la femme est un présent de Dieu
qui a voulu de la sorte
rendre plus légères
les souffrances de l’homme
qui pesaient sur son âme et sur sa chair,
à la manière d’un fardeau
insupportable et intolérable!


Ce présent ou ce cadeau,
ce fut Aphrodite-Zahra,
incarnée sous la forme d’une vierge
que les Hébreux appelèrent Ève
et les Hellènes Pandore!


Certes, certains esprits chagrins,
car superficiels,
ont vu en Ève ou en Pandore
l’origine de tous les maux
accablant la pauvre humanité!


Mais ce n’est là qu’un jugement grossier
d’amant éconduit
ou d’époux infortuné
ou de seigneur jaloux
ou, enfin, de tyran despotique
et usurpateur de pouvoir royal!


Foin de ces pensées
nuisibles comme des zizanies
et indignes d’un artiste
ou d’un sage!


Or, le balancement de la dame est
une source de félicité
pour le sage
et un réservoir
où celui-ci puise,
indéfiniment et perpétuellement,
toute son énergie,
toute son inspiration!


Oui, le tortillement du corps féminin
est le plus grand Bien
qui pourrait échoir au philosophe
comme à l’homme ordinaire!


Car il est le plus harmonieux
et le plus féerique
des mouvements de notre vie
si mouvementée
et si brève,
instable comme un printemps magnifique
dont la fin précoce
toujours nous craignons!


LA SULTANE ET LE MAMELOUK

RECUEIL INEDIT. DU 29 FEVRIER AU 4 MARS 2008