Le Ciel en Feu
Depuis que j’ai contemplé ta hanche,
semblable à la pleine lune levante de Juillet,
oui, depuis que j’ai contemplé ta croupe,
pareille au luth aimé de Sarasvatî,
la Déesse hindoue
de la parole inspirée,
j’ai perdu le goût pour la nourriture
et ne désire plus
boire de l’eau glacée,
bien qu’il fasse chaud,
et le vin lui-même de Samos
ne m’enivre plus de son bouquet exquis
et de sa suavité
qui évoque les doux plaisirs
de l’ancienne Ionie!
Et mon sommeil même
ressemble à un sommeil d’homme mort,
tant ma nuit semble sans matin,
sans lendemain!
Car, lourde comme une cloche de bronze
et large comme une porte,
la porte même du Paradis,
est ta croupe!
Et, si ton si beau derrière
soulève en moi
une telle lame d’émotion,
que dirai-je de tes fines oreilles
aux longues pendeloques de rubis
et de ton cou de cygne blanc,
orné d’un collier de perles
fraîchement cueillies?
En vérité, comment évoquer,
sans soupirer ni gémir,
ni pleurer à chaudes larmes,
tes prunelles larges,
de la musique desquelles
retentissent toutes les montagnes
de l’Hellade,
du Péloponnèse à l’Épire
et à la Macédoine,
et de la Crète à Rhodes
et à Chypre?
C’est que dans tes grands yeux
d’hymne païen
ou de cantique de Salomon,
roulent mille émeraudes d’Afghanistan
et autant de turquoises de l’Égée!
Et les flammes qu’ils jettent
sont autant de flèches amoureuses
qui font se précipiter
les battements de mon coeur,
car elles frappent de plein fouet
le centre même de ma vie,
oui, elles atteignent
le milieu de mon être,
oui, elles se plantent
comme des clous
dans le tréfonds de ma psyché!
Or, depuis que j’ai contemplé ta hanche
sous laquelle bat un coeur magnanime
et noble et distingué,
j’ai fait don de mon âme
à toi, ô gazelle du désert
devant qui s’incline,
pleine de honte,
la pleine lune d’Août
à son lever!
Ô mon Ciel en feu,
ô mon firmament ivre,
les étoiles elles-mêmes
sont tes esclaves
qui te rendent hommage,
en se prosternant à genoux,
devant tes yeux
à la beauté infinie
d’une mer sans limites!
CIELS EN FEU
RECUEIL INEDIT. DU 5 AU 10 MARS 2008