Abriza, Reine de Cappadoce


Quand je fume le narguilé
au son d’un orchestre tartare,
les volutes de tabac
m’apportent le souvenir d’Abriza,
Reine de Cappadoce!


Or, c’était une véritable Sultane
et la plus belle
d’entre les belles Orientales
qui possèdent une croupe de lait
et de cristal,
semblable par l’émotion
qu’elle procure
à un parterre de fleurs printanières,
d’où s’élèvent des hymnes à Allah
et dont le parfum est ineffable!


Oui, ses flancs argentés
évoquaient la pleine lune d’Août,
quand elle se lève
à l’orient de Césarée
ou deux croissants lunaires,
placés côte à côte!


Et quand Abriza marchait devant moi,
sa croupe bénie
montait et descendait
comme un pont-levis
ou ainsi que les lames
de la mer Noire!


Oui, sa hanche gaillarde
ressemblait à une montagne enneigée,
de celles qui entourent Césarée,
la capitale de la Cappadoce!


Et je parlais à cette beauté d’Orient
comme il suit:
«Viens, que je t’emporte
sur mon coursier blond,
viens, que je t’emporte sur mon alezan
aux rayons d’or!


«Cependant, si tu as peur de moi,
apaise ton âme
et laisse s’adoucir ton regard
si farouche, à force d’être inquiet,
car je ne te veux aucun mal,
se ce n’est de devenir
l’esclave de ton amour,
oui, le serviteur très pieux
de tes magnétiques courbes!


«N’est-tu pas celle
qui veut me faire mourir
sous les flèches acérées
de ses prunelles envoûtantes
et sous les balles porteuses de vertige
de son fabuleux derrière?


«Voilà pourquoi je désire me désaltérer,
en buvant à tes yeux
couleur de charbon!


«Oui, je désire boire du nectar de Samos,
en l’honneur de ta formidable beauté
et en hommage à ta précieuse vie!


«Or, si tu agrées mon amour,
tu obtiendras en échange
le Paradis,
je le jure par le Prophète,
que sur Lui soient toutes les bénédictions!»


Après lui avoir tenu
ces propos téméraires,
mais, ô combien galants,
je la possédai sur son lit d’ivoire
tendu de soie,
au son d’un luth de Damas,
plus merveilleux
qu’un chant de rossignolet!


L'OISELLE DE L'EDEN

RECUEIL INEDIT. DU 12 AU 17 MARS 2008