La Goutte de Violettes


Je suis l’oiseau
qui, caché derrière le feuillage
de ton pubis,
danse sur le flexible rameau
de ta taille
et sur le tronc de cocotier
de ta croupe!


À bord d’une barque
en bois de saule
et aux avirons d’or,
je remonte tes reins,
en direction du havre béni
de ton sein qui sent le musc de Chine
et le santal de l’Inde!


Puis, j’escalade la colline
qui domine ce havre,
afin de m’abreuver
à la source de tes yeux,
dont l’eau est plus fraîche
que la glace arctique
et plus douce que le miel de thym!


Et comme un nouveau Chatt-el-Arab,
je finis par me jeter
dans la mer de tes cheveux
où le goudron le dispute
à l’onde azurée!


Ô toi qui, vue de loin,
sembles une goutte de violettes
dans un champ printanier
de jaunes marguerites,
comme tu es belle ainsi,
vêtue de ta seule chevelure,
comme un cerisier vêtu de ses fleurs
ou comme un platane paré
de sa seule feuillaison!


Ah! Baiser tes prunelles de gazelle
quand tu reposes sur un coussin
brodé d’argent
et bourré de plumes d’autruche,
pareil, par l’élasticité et la fermeté,
à tes cuisses de princesse
assise sur un trône d’or massif
et constellé de rubis de Ceylan!


Or, je suis étonné de constater
que plus je m’élève
dans la hiérarchie des ascètes,
plus tu exerces de fascination
sur mon âme
qui n’a besoin désormais
que de tes yeux couleur de goudron
et doux comme le parfum des violettes,
et de tes hanches,
blanches comme le camphre,
et qui ont le volume d’une planète
scintillante dans un ciel serein!


LA MAJESTUEUSE INCONNUE

RECUEIL PUBLIE AUX EDITIONS ENCRES VIVES, COLL. ENCRES BLANCHES, EN SEPTEMBRE 2008