À une Blanche Cavalière


Quand la lune
près de sa plénitude
vogue dans le ciel immaculé de l’été
et qu’au milieu des chants longs
des grillons
le coucou nous lance
des appels lancinants,
l’envie me prend
de te faire de terribles serments
d’amour éternelle:
«Quand les cerisiers
ne fleuriront plus en Avril,
quand il n’y aura plus
de roses odorantes,
quand il n’y aura plus
ni platanaies ni oliveraies
en Hellade,
quand les hirondelles
ne feront plus leurs nids
dans les maisons des hommes,
mais au bord des rivières,
quand enfin l’eau sera plus lourde
que la terre,
alors seulement je songerai
à te quitter!»


Oui, seul un extraordinaire désordre
dans la Nature,
une catastrophe envoyée
par Shiva le Destructeur
et le Séparateur,
pourraient me séparer de toi,
en m’arrachant à mon âme!


Or, qu’importe si je ne visiterai pas
le palais royal d’Ugarit
ou le temple de Baal
qui se dressait jadis dans cette noble cité,
puisque la Beauté
s’est incarnée en toi?


Oui, que m’importe
si je ne verrai jamais le sourire du Bouddha
qui se trouve dans le temple de l’Aurore,
puisque dans ton sourire
je vois celui de la Mère du Bouddha,
quand celui-ci n’était qu’un bébé?


Par le ciel splendide de Grèce
où les blancs peupliers
et les blanches petites nuées
s’aiment d’amour platonicienne,
je jure de ne jamais
m’éloigner de toi,
ne serait-ce qu’en pensée!


Si tant les eaux de l’Alphée
chantent à Olympie,
si les couronnes de lauriers
ne s’y fanent jamais
et si le ciel
y est rarement obscurci de nuages,
c’est qu’une belle après-midi de Mai,
tu l’as traversée sur ta blanche pouliche,
ô ma blanche cavalière!


LA CARAVANE DE L'AMOUR

RECUEIL INEDIT. DU 9 AU 16 JUIN 2008