Le Grand Midi


La mer coule dans mes veines
comme un sang égéen,
inoculant en moi
la fièvre créatrice de cantiques
et de tropaires
dont on se souviendra
à la fin du siècle présent
et dont les philologues
et tous les autres savants
avidement mais en vain
rechercheront le secret douloureux,
inhérent à mon existence même!


Et ce haut mal qui m’afflige
m’a peut-être été légué
par la Gorgone, cette maîtresse de l’Hellade
et de ses mers,
poussant ses enfants à l’aventure,
à la quête de l’Autre
et de l’Ailleurs!


Or, cet Autre et cet Ailleurs
ne peuvent être vraiment vécus par moi
qu’à travers les yeux châtains
des jeunes filles de l’Archipel grec
dont le visage hâlé par le soleil
porte les traces du sel marin
et de la lumière azurée
partout présente dans ces contrées
battues des flots
et des vents!


Oui, les yeux des jouvencelles hellènes
disent l’été, l’auguste,
l’olympien été des Cyclades,
des Sporades, de la Crète
ou de Cythère et des îles Ioniennes!


Or, j’ai toujours cherché
à m’unir à l’été!
Et aujourd’hui où nous fêtons
la Transfiguration du Seigneur,
je crois saisir l’été
à travers les métamorphoses de la mer
virant du bleu foncé
au bleu tendre
et de la houle endiablée
à la pure bonace!


Oui, l’Hellade est un pays bleu
où dansent en rond,
autour de l’autel de Dionysos,
en se tenant par la main,
les Bacchantes et leurs époux, les Satyres,
et où Pan, le chèvre-pieds,
appelle toujours les Nymphes
à s’unir à lui
sur une couche agreste,
cependant que sur sa flûte pastorale
il chante le Grand Midi!


SANG EGEEN

RECUEIL INEDIT. DU 24 JUILLET AU 06 AOUT 2008