Le Nouveau Soleil
Ô mon soleil de Mai
qui me baignes d’espérance,
ô ma fleur d’oranger
qui macéras dans du vin de dattes,
ô mon bel olivier de Laurion
dont la vue me coupe le souffle,
ô ma grappe de glycines parfumées
à la tige de chrysoprase,
tout ce que je demande,
c’est de devenir ton esclave
ou de m’anéantir
à l’ombre de tes longs cils!
Et, en gage de ma servitude,
daigne accepter cette bague
que je porte à la main droite
et dont le chaton de rubis
porte en caractères d’or
une inscription qui traduit
cette pensée de Mahomet :
« Tout ce qui est sur la terre
a été créé pour votre jouissance !
Et je ne vieux rien pour moi,
si ce n’est de pouvoir caresser à loisir
ta croupe plus moelleuse que le velours
et plus impalpable ou plus aérienne
que la mousseline qui la recouvre !
Mais, si j’aime tant ta hanche,
c’est en raison des tatouages magnifiques
dont elle est admirablement ornée !
Sur son hémisphère lunaire droit,
c’est une paonne qui y est illustrée, une paonne
en train de faire l’amour
avec un paon,
et sur son hémisphère lunaire gauche,
c’est une gazelle qui y est représentée,
une gazelle fine qui se désaltère en secret
à une fontaine
au lever de la lune!
Mais, si j’aime tant ta hanche,
c’est aussi parce qu’elle change de teinte
selon les jours,
comme la mer!
Et, tantôt elle a la couleur mate
d’un oeuf d’autruche
chauffé par le sable du désert,
tantôt elle est d’une blancheur
de lait maternel,
et tantôt enfin, elle évoque plutôt
une églantine !
Si quelque chose t’étonne
dans mon discours,
ou si tu trouves que mes louanges
sont à dessein exagérées,
prends un miroir d’Alep
et mire-toi en lui !
Alors, tu comprendras
pourquoi tant de guerriers
de grande valeur
crient ton nom dans le tumulte
des batailles qu’ils livrent
uniquement pour toi,
ou pourquoi Aphrodite
chemine depuis Chypre,
afin de venir admirer
le nouveau soleil :
toi !
LA SOEUR DE LA LUNE
RECUEIL INEDIT. DU 18 AU 25 SEPTEMBRE 2008