À Une Fille de Platane


Sous le haut ciel d'amour
tu te tiens quiète,
la brune chevelure
bruissante dans la platanaie d'or
de mille neuf cents castagnettes d'ébène,
sonnantes comme autant de cigales de feu
dont le chant démiurgique
évoquerait les crotales
des choeurs de l'Ida phrygien
qui, sous la direction d'Aura,
autrement dit de la Brise,
célèbrent la Grande Déesse
Rhéa-Cybèle,
la Mère des Dieux,
Celle qui mène les lions
à la guerre de conquête
Celle qui attelle à son char de bronze
des panthères mouchetées
de noirs diamants
et frémissantes sous le fouet
de cette Reine
d'entre les Divinités maternelles!


Cependant, au loin, dans la plaine,
se déploie la légion des oliviers
vêtus d'armures d'argent,
et, tout près de toi,
le lierre monte
sur le tronc des arbres,
de ces platanes dont les feuilles
te revêtent toute entière,
faisant de toi une de ces fées
que l'on voit dans les songes
les plus délicats des nuits d'été
vécues à Délos la Sainte
ou à Mykonos la Venteuse
ou à Zakynthos la Pure
ou à Leucade la Blanche,
l'immatérielle île!


Et la mer de se briser
avec furie sur le rivage de Marathon,
cachant dans ses entrailles
toute une armée perse
que les vaillants, les valeureux Athéniens
écraseront tout à l'heure
de leur fer venu
des forges d'Héphaistos!


On sent vraiment,
sur la marathonienne mer
souffler, comme le vent du Nord
venu de la mer Noire,
toute la merveilleuse fraîcheur
de ton âme prodigieuse!


Et l'on voit,
entre les feuilles de platanes
qui composent ta robe végétale,
si longue,
briller toute la tendresse de ton coeur
qui seul sur cette terre
possède les qualités nécessaires
à bien aimer!


Parmi ces qualités de ton coeur
nécessaires à la belle amour,
il faut sans doute compter
la noblesse,
l'aptitude à la gratitude
et la capacité d'estimer autrui
à sa juste mesure
et, notamment, de distinguer,
parmi une myriade de mortels,
l'homme à l'âme héroïque,
toute en volonté de triomphe
et de gloire
et, donc, aussi, de puissance!


Et, cependant que les champs fauves de l'été
ondoient sous le vent organique
venu de ta poitrine,
une eau suave
coule doucement dans ta vulve
où il fait bon vivre
d'eau venue du firmament en voûte
des platanes!


CIGALES DE FEU

RECUEIL INEDIT. 30 JUILLET 2006