La Mer des Pivoines
Je t’ai espérée
comme les laboureurs anciens
espéraient une bonne récolte,
dans l’angoisse
devant l’éventualité d’une disette
et dans le désir
de jours meilleurs,
marqués de blanc
sur l’écritoire latine de l’éternité !
Et quand tu es arrivée
dans ma vie,
ce fut comme si auparavant j’étais mort
et que je me mettais à revivre !
Ma stupéfaction devant l’événement imprévu
de notre rencontre
fut l’étonnement d’un homme
qui sent tomber sur sa tête
la lune et les étoiles !
C’est que tu es une mer de pivoines
ou la moindre tige,
le poindre pétale est une étincelle
et le tout, un brasier
qui illumine jusqu’à mes racines,
jusqu’à mes feuilles, mes fleurs
et mes fruits !
Oui, tu es la mer de Chine
de mon art poétique
et j’ai pêché dans tes eaux poissonneuses
nombre d’images inédites
et d’autres, connues,
mais d’une forme,
d’une expression nouvelles !
Oui, tu es le vivier
où je puise la double force
d’aimer les femmes
et de créer,
en reprenant l’art littéraire
au point où Baudelaire
et d’autres ancêtres
l’avaient laissé,
il y a plus d’un siècle !
Et ton coeur doux,
ta hanche ample
et tes yeux noirs,
où on lit le plaisir,
participent de mon indicible bonheur
de te tenir dans mes bras
pour la vie
et d’ouvrir ainsi la voie
aux poètes qui dans un avenir proche
triompheront enfin de la désamour
dans laquelle sont tenus les lettrés
par une époque qui n’est qu’une saison humaine
parmi tant d’autres,
passées et à venir,
mais qui se prend pour l’éternité !
LA MER DES PIVOINES
RECUEIL INEDIT. DU 19 AU 26 DECEMBRE 2008