L’Envoyée des Forces Consolatrices


Ô toi dont les orteils
sont teints de cinabre,
les ongles de laque rouge
et les pointes des mammes
de vermillon,
oui, toi dont la vulve est somptueuse
comme cet idéogramme
où figure une cible
traversée en son milieu
par une flèche
et qui est aussi le caractère
qui représente la Chine
en tant qu’Empire du Milieu,
agrée cet hymne
pareil à une suite confuse
de confidences :
« Fait pour la solitude,
je n’ai point par le passé
conversé avec autrui ! »


« Certes, ceux qui savent
le mieux parler,
ne sont pas ceux qui ont les meilleures,
les plus essentielles,
les plus lourdes de sens
ou les plus séduisantes paroles
à dire ! »


« Le peu de paroles
que j’ai réussi à dire
tout au long de ma vie
ont sonné faux
aux oreilles des hommes
ou des femmes qui m’ont approché ! »


« N’est-ce pas Lao-Tseu
qui a dit que souvent
le vrai sonne faux
et le faux sonne vrai ? »


« Par ailleurs, bien que je sois
un homme qui tient toujours
ses promesses,
les femmes m’ont souverainement ignoré ! »


« Or, selon Confucius,
l’homme qui n’a pas de parole
est moins utile
qu’une voiture sans attelage ! »


« Oui, les hommes
dans leur grande majorité
ne sont que des chars à boeuf
sans joug,
des carrosses de roi brisés
ou des navires désarmés ! »


« Ô toi dont les sourcils sont
plus beaux que les arcs de triomphe
dressés aux portes
des cités siamoises,
et dont le pubis est un phénix
descendu du ciel
et combattu par les jaloux,
songe que même mes opinions
couchées sur le papier
ont toujours paru incompréhensibles
à mes contemporains ! »


« Ô toi qui es apparue
quand dans ma vie
il faisait soleil,
oui, toi qui es apparue
au matin radieux
où ma pensée s’éveillait
d’une longue hibernation,
sache que tu m’as été envoyée
par les forces de consolation
qui, à notre insu, agissent dans l’univers
afin que tu jonches mon chemin
de pétales de pivoines
et de roses ! »


GOUTTES DE BRUINE

RECUEIL INEDIT. DU 04 AU 10 JANVIER 2009