Le Bouquet de Flammes


Branche fleurie de manguier,
mon espoir monte haut
dans le ciel,
semblable à un bouquet de flammes !


Malheur à celui
qui brisera mon espoir,
beau comme l’Asie du Sud
et comme la Fête du Printemps !


Jamais dans ma folle jeunesse
je n’aurais imaginé
que les murs
que s’évertuaient à élever alors
autour de moi
des hommes dépourvus de sagesse,
plus naïfs en vérité
que cruels,
oui, je n’aurais jamais imaginé
que ces murs atteindraient
une telle hauteur
et qu’ils seraient si muets
et si implacables !


Or, justement le but
de cette construction de murs
était de me séparer à jamais
du reste de l’humanité !


Et ma jeunesse ne fut
qu’une suite d’orages,
qu’une chaîne de désastres !


Alors que, fuyant les murs de ma chambre,
je me trouvais dans une belle prairie
en train de rêvasser,
je suis tombé dans un profond puits
plein de serpents
qui me mordaient aux pieds,
au ventre, à la poitrine
et à la figure !


En effet, Kalidasa,
prince des poètes indiens,
dit qu’un tapis de fleurs
dissimule souvent
l’ouverture d’un puits !


À peine remonté à la surface,
grâce à l’aide de personnes pieuses,
je me suis égaré dans un désert
à mille lieues de toute oasis habitée
et sans sable blond
où étaler mes membres fatigués
à la tombée de la nuit !


Car, c’était un désert pierreux,
comme ceux d’Iran
ou d’Afghanistan
et situé au-delà des frontières
de l’Inde maternelle ,
dans un pays où l’on adorait
un dieu si différent
des dieux et des déesses hindous,
si chers à mon âme !


Et seules quelques caravanes
passaient de temps en temps
sur le chemin à peine dessiné,
et dont les marchands
ignoraient ma langue,
comme j’ignorais la leur !


J’atteignis l’Inde
au crépuscule d’un jour de printemps
où j’avais longuement médité
sur les fins dernières de l’homme !


De jeunes Indiennes apparurent,
vêtues de saris rouges
qui les faisaient ressembler
à des nefs en feu !


Ces jeunes filles,
qui portaient une cruche sur l’épaule,
devaient devenir plus tard
mes plus fidèles compagnes
dans ce palais de marbre rose
que j’ai bâti de mes mains
sur les rives du Brahmapoutre !


Car aujourd’hui, je sais saluer la beauté
qui ne peut être qu’indienne !


Et les murs qui m’avaient séparé
jusqu’au seuil de la maturité
de mes frères et soeurs,
ont été remplacés
par de larges baies vitrées
par où je contemple
le ciel hindou,
à la fois immense et proche,
et vénérable et doux !


L'ABEILLE-SOLEIL

RECUEIL INEDIT. DU 14 AU 19 FEVRIER 2009