Sarmichtâ ou le Rêve de l’Éden
Ô ma Sarmichtâ,
feuille de lotus
remplie d’émeraudes, de turquoises,
de rubis et de topazes !
De même que l’abeille, pour butiner,
se contente de respirer l’arôme du lotus,
de même moi, pour t’aimer,
je me contente de respirer
l’essence de rose de ton coeur !
Certes, je ne manque pas une seule occasion
de louer tes fesses d’or,
tes cuisses d’argent,
ton ventre d’onyx,
tes seins de bronze,
tes reins d’agate,
les rivières de tes bras,
les nues de tes aisselles
artistement épilées et parfumées,
les anguilles de tes jambes,
ta vulve de velours,
ton pubis de soie,
ton ombilic d’amour,
tes pieds délicats
teints de laque rouge des Indes
et tes mains
plus fines que l’élégant et mince
bracelet d’ivoire
que tu portes à ton poignet droit !
Et comment ne pas faire aussi
l’éloge de tes lèvres
pareilles à l’aurore tropicale,
de tes prunelles
où dansent les charbons ardents
et de tes cheveux,
délire des anges
et orgueil des houris
qui sont tes soeurs bienheureuses ?
Cependant, puisse l’eau lustrale
éloigner de ma chair
les flammes de la concupiscence !
Car ta croupe superbe,
pareille à une vague de l’océan Indien,
et tous tes autres appas
seraient du néant
sans l’âme tienne,
oui, sans cette âme merveilleuse
qui mue le pur désir de la chair
en hymne d’amour
qui est l’hymne d’une âme
adressé à la déesse
protégeant les jeunes beautés
de la disgrâce de la haine
et du dédain !
Or, haïr
ou dédaigner une vierge,
cela équivaut à jeter
de l’eau bouillante
sur une fleur : aussitôt, elle s’étiolera !
Mais, pour que la déesse
accorde sa protection
à une jeune fille,
il faut que celle-ci se comporte
comme une flûte enchantée :
elle doit croire à la parabole de l’amour
et au rêve du paradis sur terre !
LA RIVIERE ET LA MER
RECUEIL INEDIT.DU 22 AU 29 AOUT 2009