De l’Amoureuse Souffrance


Ô ma Bien-Aimée,
quand tu es assise,
pleine d’abandon,
sur la terrasse,
parmi les pots de basilic,
mon coeur se retient à peine
de t’aimer avec les yeux !


Sache, cependant, que depuis un bon moment,
ma vie a entamé
la seconde moitié
de sa durée totale,
sans que pour autant
mes desseins se réalisent
et mes désirs s’accomplissent !


Je demeure à ce jour
étranger dans mon propre pays
et je suis pauvre et désespéré !


N’avaient-ils pas raison
ces sages persans
qui appelaient le monde
« une ruine »
et la vie de chacun
« une énigme » ?


Ma seule félicité réside dans les rêves,
il est vrai sublimes,
où l’on voit de brunes princesses
se promener dans les roseraies
ou se baigner au clair de lune,
vêtues seulement de leurs cheveux embaumés,
dans des étangs spécialement aménagés,
parmi les carpes d’or,
ou dormir sereinement
sur des lits à baldaquin
tendus de satin bleu pâle,
et dans des chambres
éclairées par une veilleuse
ressemblant à une lune d’été
et qui jaillit de leurs têtes
comme un rosier géant,
devenant un météore
dans le firmament
contemplé à travers la baie vitrée !


Malgré la beauté de ces rêves,
puis-je fuir éternellement
une déplaisante destinée
dans le rêve ?
Est-ce là vivre ?


Car, non seulement
je suis exilé de l’Amour,
mais aussi, je suis banni
de la vie elle-même !


Cependant, je me souviens
de ces vers de Hafiz le Chirazi :
« Dans la voie de l’Amour,
la souffrance est une joie !
Que le coeur désireux de guérir
soit blessé davantage » ! »


Car l’Amour sans épines
est un doux sentier,
ombragé de palmes,
mais qui, malheureusement,
mène au désert amer
de l’orgueil né d’un coeur de pierre
qui n’a jamais essuyé
ni défaite, ni désaveu !


VENTS DE QASIDAS

RECUEIL INEDIT. DU 22 AU 27 SEPTEMBRE 2009