La Prosternation


Lorsque au coucher du soleil automnal,
tu te promènes sous les portiques,
vêtue d’un pantalon pourpre
et d’un chemisier safran,
ta croupe semble une nef
que le vent inflexible du Nord
pousse vers le large,
cependant que le reflux des vagues
la ramène vers le rivage !


Et ton corps tout entier
devient un vaisseau qui vogue dans l’Égée,
entre Andros, Ténos, Myconos
et enfin, Délos !


Quand tu arrives
devant Délos la Blanche,
avec des pierreries aux doigts
et un diadème d’or
dans les cheveux luisants
qui distillent le musc et le jasmin,
je suis si étonné de ta beauté
que je me mets à genoux
en pleine rue,
à même le sol dur,
afin de t’adorer,
ainsi qu’il sied à une Déesse,
la Déesse tutélaire de Délos,
Artémis-Diane !


Et la foule des Fidèles
de se prosterner devant toi,
parce que tu es un chef-d’oeuvre de beauté,
oui, tu es l’image même d’Artémis,
telle que la rêvent les artistes
et surtout les peintres et les sculpteurs,
car tu es une statue vivante
de Diane la Chasseresse,
à moins que tu ne sois
une statue d’Aphrodite-Vénus,
Celle qu’on vénère à Cythère !


Or, en me trainant à tes pieds,
je sens ta beauté
couler en moi,
tant et si bien qu’une fois revenu
de mon extase,
je te revois en pensée
et ne puis goûter le sommeil
quand je rentre dans ma demeure !


Ah ! Pourquoi faut-il donc
que tu possèdes un corps
aussi extraordinaire ?
Et pourquoi faut-il
que ce corps si vigoureux
et si gracieux,
tu le mettes en valeur,
de façon si stupéfiante,
par un beau chemisier
brodé de cygnes d’or
et par un pantalon moulant
aux reflets de soleil couchant ?


Ô toi qui ne respectes
ni les convenances,
ni même les interdits,
perce-moi de part en part
avec ce petit poignard
incrusté de nacre
que tu portes à la ceinture,
afin que, vaincu par toi,
je puisse t’aimer
comme tu le mérites !


VENT DU SUD

ENCRES VIVES. COLL. LIEU. JANVIER 2010