À la Divine Coquette
De ce lieu excentré,
on ne peut entendre ni les hymnes
que les Parsis de l'Inde
adressent au soleil levant,
ni les trompettes qui, en Iran,
saluent l'aurore,
ni les tambours d'Afrique
qui ponctuent la venue des deux crépuscules,
de celui du matin
et de celui du soir!
Qu'importe! Ce sont tes hanches
lourdes et musquées
qui sont les trompettes sonnantes
de l'aurore
et les dithyrambes au soleil levant
et les tambours battants
de l'aube!
En effet, y a-t-il au monde
un spectacle plus beau
et une musique plus ivre
que ceux de tes fesses
posées sur ce lit royal
à baldaquin nacré,
sous cette tente d'hyacinthe et d'émeraude,
à travers laquelle filtre
la lumière du jour naissant?
Aucun signe envoyé par le ciel,
aucun lion de flamme,
ne peuvent faire chavirer davantage
ma pauvre raison qui s'égare
à la vue de ta croupe
offerte au zéphyr
soufflant de la mer
vers les oasis syriaques ou arabiques,
et qui est tiède et spacieuse
comme un nid d'hirondelle
et se balance comme un bouton de nénuphar
sur un lac sillonné par les barques festives
et chante comme Sapho de Mytilène
ou comme les dames troubadouresses
de Provence
ou comme les geishas nipponnes!
Ô divine, laisse libre cours
à ta coquetterie,
fais éclater ton génie féminin
qui humilie l'Islam
et rabaisse la Chrétienté!
En fait, je ne puis comprendre
sur ce point
les docteurs de la loi
qui prétendent qu'une femme,
en raison de la vanité de son sexe,
ne saurait entrer au paradis
dont l'accès est pourtant libre
à la colombe de Noé
ou à l'âne de Jésus!
Or, ta coquetterie, ô femme,
est à l'origine de tous les livres,
les sacrés comme les profanes,
et engendre maintes séditions populaires
ou révolutions de palais!
Et, c'est d'elle que procède
la poétique de toutes les religions
dravidiennes, aryennes
ou sémitiques!
J'en sais quelque chose,
moi qui avec un religieux désir
te contemple
quand tu m'ouvres ta robe
ou tu dégrafes ton corsage
et que ta chair
splendide et brûlante
comme le soleil de Syrie
apparaît à mes prunelles
chavirées d'amour!
LA COURONNE DE GLYCINES
RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2007