À Une Reine Hindoue


Ô femme aux grands seins
et couronnée de fibres de lotus,
tu es belle comme la fin de la nuit
et comme Sarasvati,
la Déesse de l'inspiration!


Du fond des ténèbres
où j'erre,
je vois ta lampe solitaire
briller sur la cime de cette montagne
qu'enlace notre illustre cité,
comme un jasmin un bel arbre
en son printemps!


Et de même qu'à l'origine des temps,
la Déesse Créatrice de l'univers
portait dans Sa Pensée
l'humanité future,
toi, tu portes dans tes entrailles
le poème qui est le fruit de notre union
et qui est un bel enfant!


Ah! Comme tu unis les vapeurs chaudes de l'été
aux nuées glacées de l'hiver,
de par ton corps de feu
uni à ton âme de neige!


Que ne suis-je ton miroir,
afin que tu déroules devant moi
les violettes athéniennes
de ta chevelure abondante!


Que ne suis-je un étang,
afin que tu baignes tes membres
en moi!


Que ne suis-je ta chaussure,
afin que je presse ton pied délicat!


Tes hanches aux courbes d'aoud
se balancent comme les rameaux d'un manguier
dont le feuillage frémit
sous la brise
et dont chaque fleur est une flamme
qui est, à elle seule,
le Printemps!


Toucher tes fesses,
c'est s'envoler sur le char du soleil
et prendre le chemin de la Voie lactée,
par-delà les nuages,
et plonger dans le fleuve céleste,
ainsi qu'un titan immortel!


Ô belle Hindoue aux tresses brunes,
que ne suis-je cette perle sur ta gorge,
afin que je sente
ton coeur bondir d'émotion
quand je t'adresse la parole!


Et que ne suis-je la robe
que tu portes,
afin que tu me teignes
de ton sang menstruel!


Puisse cette ode,
écrite sur une écorce de palmier
avec le crayon qui te sert
à teindre en noir tes longs cils,
oui, puisse, disais-je, cette ode
te porter bonheur,
afin que tes voeux d'amour
se réalisent agréablement
sous la lune de Mai
et que tes rêves nobles
dorent les eaux foisonnantes
des grandes rivières
se jetant dans la mer infinie
comme du pollen de nénuphar
surnageant à la surface
de l'onde plantureuse!


CORPS DE LIBERTE

RECUEIL INEDIT. DU 9 AU 15 MARS 2007