La Destinée De Plumes


Ô fille de Palma
à la capeline de Parisienne,
ô toi que Louis Quinze eût aimé,
lui qui aimait tant
les parfums naturels du corps de la femme
en grand seigneur qu'il était,
arrière- arrière- petit-fils
de Henri IV de France et de Navarre
qui de son vivant doctement voluptueux
honora de la villageoise hâlée
jusqu'à la fille pâle de la noblesse,
ô toi, donzelle aimable,
accepte cet hommage
à la fois fou et raisonnable,
sinon fantasque, sinon capricieux!


Tu es un champ de blé
riche des caresses du Soleil- Amant,
tu es une allée de platanes
arrosée par le ruisseau
qui naît au bord de tes dents
pareilles à l'eau de neige des Alpes
qu' Hannibal eût bu
lors de son passage sur ces altitudes
dont procèdent ton esprit altier
et ton âme rivale des aigles romaines
que tu eusses battues à plate couture
si, dans une antérieure existence,
la liberté t'en avait été offerte,
à toi qui es la liberté même
conquise par ta passion
à peine retenue par ta valeur
de dame de qualité!


Ô toi, ma princesse fantastique,
et ma duchesse belle
comme une lionne de nue
ou comme un galion espagnol
ou comme une corvette anglaise,
sois pour moi le bateau ivre
qui me fera aborder aux plages de sucre,
aux contrées à coton
et aux pays à café
où nous célébrerons nos noces,
toi vêtue à la marinière,
moi avec une couronne de topazes sur la tête!


Ô chasseresse de haute volerie,
tu es une fusée
que je lance dans le ciel pur,
un faucon que je tiens
sur mon poing gauche,
cependant que de ma main droite
je soutiens ton rein de flamme lubrique
et ta hanche de faisan de Rome,
bénéfique comme le baume de Pancaya
et élastique comme le caoutchouc
naturel du Brésil
dont on fabrique la roue de la fortune

roulant sur les chemins de velours,
devant le Christ de Rio de Janeïro!


Ô rose accablée de lune,
sois l'amante qui m'arrachera
au sommeil des morts
en vue d'une destinée
de plumes de condor!


TEMPETE DE QUARTZ

RECUEIL INEDIT