La Nef Portugaise


Ô chanteuse du fado de l'abandon
et de la quiétude,
c'est à toi que je destine cet hymne,
écrit sous le signe de la Lyre sonore!


Ô mon encens de Dhofar,
le plus odorant des encens,
c'est toi que je brûlerai
sur l'autel de la Déesse amoureuse!


Ô mon coco de mer,
fruit de cette plante
qui pousse au fond de la mer des Maldives
et qui est un antidote puissant
aux peines du coeur!


Ton corps est plus opulent
qu'une étoffe d'Orissa
ou que la gaze du Siam,
et plus odoriférant que le santal de Timor
ou que le bois d'aigle de Tsian-Pa
ou que l'ambre gris
que l'on recueille au large des côtes
d'Afrique orientale!


Et tu es plus belle que Chittagong,
cité florissante du Bengale,
de cette contrée qui est l'une des plus célèbres
au monde,
fameuse surtout pour son école de poésie,
depuis plus d'un millénaire!


Et tu t'étires voluptueusement,
ainsi qu'une tigresse blanche
au temps des amours
ou comme le vaste empire du Siam
s'étendant avec majesté
d'Ouest en Est!


Ah! Que je suis friand de tes mamelons,
comme un perroquet l'est
des girofles encore verts!


Ah! Que j'aime ta hanche,
plus large que le Mékong,
le Maître des eaux
dans le langage de là-bas!


Ah! Comme je jouis de tes fesses
qui, quand tu marches,
s'élèvent et s'abaissent,
comme la mer de Chine
sous l'effet des marées!


Puisse Mercure,
le Dieu qui fait don aux hommes
de l'éloquence,
oui, puisse Mercure m'aider
à achever cet hymne
à toi dédié,
ô divine,
ô sublime officiante
de l'amour!


Ah! Puissé-je monter au troisième ciel,
domaine de Vénus,
et de là te contempler à loisir,
ô chanteuse selon mon coeur,
ô nef portugaise de mon âme,
dont l'étrave fend toutes les mers
de ce monde
et qui porte dans ses flancs
les parfums, les sons
et les lumières des contrées
les plus lointaines
et les plus exotiques!


Ô Portugal, plus qu'une terre,
tu es un voyage permanent
dans les mers du Sud,
oui, un voyage sans fin ni limite!


LA NEF PORTUGAISE

RECUEIL INEDIT. DU 26 JUIN AU 02 JUILLET 2010