Un Cactus dans le Désert
Exilé dans ce port du bout du monde,
je soupire après une certaine brune
de mon passé,
celle même qui la première
alluma en moi un feu
plus fort que celui
des plus fortes canicules sévillanes,
un feu amoureux
qui devait plus tard
incendier la pinède de mon cerveau
et la réduire en cendres,
d'où pourtant j'ai ressurgi,
il y a de cela quelques années,
semblable au phénix,
l'oiseau fabuleux d'Égypte!
Or, pareil au phénix de la légende,
j'ai nettoyé la pinède calcinée de mon cerveau
de ses troncs morts
et l'ai fécondée à nouveau,
en faisant tomber sur elle
une pluie bienfaisante en plein calme estival,
en pleine sérénité d'été!
Ce ciel bleu tendre
et cette mer indigo
évoquent pour moi
le pays de ma Bien-Aimée
où j'ai passé un inoubliable été,
entre la Sierra Nevada et la Véga de Grenade,
rouge de ses grenadiers
et fauve de ses épis
qui ondulaient sous le zéphyr,
pareils, par l'opulence, à ses cheveux
qui, certes, étaient châtains,
mais d'un châtain
doré par le soleil de midi,
tant et si bien qu'ils semblaient mordorés
comme une statue baroque en bois peint,
de celles qui ornent les églises du Mexique!
Ô mon Adorée, ma Bien-Aimée,
tu étais blanche comme une église mexicaine
à San Cristobal,
et aussi exubérante
que ces vestiges splendides de l'art baroque
dans les anciennes colonies espagnoles
d'Amérique!
Et, bien que ton sang
ne fût pas mâtiné de sang indien,
ton âme fut un fier cactus
dans le désert où je vivais
dans ma prime jeunesse,
un cactus dont les branches puissantes
m'offrirent une ombre
à laquelle, aujourd'hui encore,
je suis reconnaissant!
Et, bien que je fusse fortement piqué
par les épines de ton cactus,
je garde de toi un souvenir
que rien n'est venu altérer,
pas même la douleur!
Oui, tu es le phare qui luit
au fond de ma mémoire!
LA DAME DE L'ETE
RECUEIL INEDIT. DU 23 AU 28 JUILET 2010