La Reine Sauvage


Tu fus à la fois une épousée,
une prêtresse et une femme!


Et tu fus une souveraine solitaire,
une reine sauvage
et une nymphe de la rosée
se répandant en gouttelettes
sur les feuilles des rosiers
et sur le romarin
et les autres plantes aromatiques,
tels que le basilic et la menthe!


Tu fus plus belle
que la pleine lune de Juillet
et plus douce que les prairies
où paissent les brebis
par les après-midi d'Août,
entre Grenade et Malaga!


Tu fus si merveilleuse,
qu'aujourd'hui tu sembles un personnage
de fiction aux ignorants,
alors qu'en réalité
tu fus la plus humble des mortelles,
tout juste une frêle jeune fille
portée à la rêverie,
mais aussi au plaisir et au loisir,
voire à la paresse
et au nonchaloir!


Mais, loin d'être une oisive,
tu étudiais la science des lettres
et tu composas même une nouvelle
résumant toutes tes aventures
dans l'inextricable labyrinthe
des rues de la petite cité de la renaissance
où nous habitions alors tous deux!


Une de ces aventures
fut notre rencontre inattendue,
quoique prédestinée,
quioque depuis toujours espérée!


Ainsi, nos deux destinées se touchèrent
et se joignirent pendant un éclair
qui dura autant que l'éternité,
puisqu' il dure toujours
et durera tant que je respirerai
la rose de ton souvenir,
oui, du souvenir que je garde
de tes grands yeux noirs
et de ton teint ambré,
ô plus brune que la Sierra Morena,
plus fatale que toutes les Gitanes
et plus enflammée que toutes les Mauresques,
celles qui chantent
pendant qu'elles se baignent
ou qui regardent avec espoir les passants
du balcon de nacre de leurs beaux seins!


J'essaie présentement de résoudre l'énigme
de notre rencontre par un jour de Février
où, assis sur un banc,
je lisais un livre de poèmes,
dans un parc ensoleillé et glacé!


Mais je ne suis pas près
de résoudre cette énigme!
Et le Sphinx qui naguère me la posa
reste silencieux,
exigeant de moi une réponse
dont dépend ma joie en ce monde!


LEVRETTE MAURESQUE

RECUEIL INEDIT. DU 29 JUILLET AU 04 AOUT 2010