Le Cerisier de Montagne


Ni soir, ni matin,
je ne détache ma pensée
de la femme aimée,
comme si elle était un cerisier
dont je contemplerais les fleurs
sur quelque montagne!


N'ai-je pas entrevu mon adorée
entre des cerisiers en fleurs,
quand je devins amoureux d'elle?


Hélas! De même que dans une année
le printemps ne vient qu'une seule fois,
de même dans la vie d'un homme
l'amour véritable ne vient qu'une seule fois,
dans la prime jeunesse,
et toutes les amours ultérieures
n'en sont que la caricature
qui fait de nous les comédiens de nous-mêmes!


Et de même que l'oie sauvage crie,
lorsqu'elle traverse les nues d'automne,
de même moi, sous la lune de Novembre,
je pleure sur mon sort,
oui, je pleure à cause du mal
que je me fis dans ma jeunesse première,
en repoussant l'unique chance d'amour
qui s'est jamais offerte à moi!


Habitué à dormir tout seul,
le temps qui s'écoule de la nuit à l'aube
me paraît désespérément long,
oui, mon coeur bat violemment la nuit,
car je suis inquiet pour la vie
de ma Bien-Aimée!
Et la question de savoir
si, oui ou non, elle est encore en vie,
ne cesse de me tarauder!


Oui, bien qu'elle n'ait pas
tenu les promesses qu'elle m'avait faites,
sa vie m'est chère, voire essentielle!


Mais qui, sur cette terre
a jamais tenu les promesses
qu'il avait faites à lui-même
et à la vie? Personne!


Seul moi n'ai pas changé
depuis que,
ébloui par ses prunelles et sa hanche,
je me suis engagé envers cette beauté!


Ô toi, oiseau de mon coeur,
mon amour de jeunesse,
je ne connus pas d'autre femme
en dehors de toi,
depuis ta venue dans ma vie,
qui coïncida avec mon arrivée
dans l'univers des poètes,
il y a de cela
quarante bonnes années!


LES OIES SAUVAGES DE L'INFORTUNE

RECUEIL INEDIT. DU 02 AU 08 NOVEMBRE 2010