À la Maîtresse-Ballerine


Après les ébats amoureux
auxquels nous nous livrâmes
en pleine langueur tropicale,
je te sens brûlante sous moi,
comme de l'or fondu
au fond d'une forge
où l'on perd la mémoire
ou comme une eau de bain
qui aurait été chauffée
sur des braises!


Et, de même que sous les Tropiques
on peut se fier à la tiédeur de l'air
qui ne se refroidit jamais
et où la brise n'est jamais trop vive,
de même je peux me fier
à la chaleur de ton corps
qui ne se refroidira pas,
tant que je garderai mes bras
serrés autour de ta taille,
plus mince que le plus fin anneau
de perles roses
que de mémoire d'Indochinoise
ait été porté sur le petit doigt!


Ah! Comme j'aime à câliner
ta riche chevelure noire,
entrelacée de jasmins parfumés,
cependant que dans l'air tiède du soir
se lève l'odeur anesthésiante
des herbes aromatiques que l'on brûle
pour éloigner les insectes nocturnes!


Or, j'attends de toi
qu'à minuit tu danses pour moi,
aux sons des flûtes et des cithares
de la musique ancienne,
les danses de cour khmères
qui ne sont autres
que celles que semblent danser
les courtisanes divines
peintes sur les murs d'Angor-Vat!


Et, une fois cette unique représentation
achevée,
je plongerai dans l'inconscience du sommeil
où je ne rêverai qu'à notre rencontre,
placée sous le signe du Phénix,
de qui ton esprit danseur procède,
ô maîtresse-ballerine, ma soeur!


LA FEMME-TERRE

RECUEIL INEDIT. DU 04 AU 12 JUIN 2011