La Prairie d'Asphodèles


Ô toi dont naguère
la chevelure embaumait les orangeraies de Valence
et dont le visage dorait le ciel de Murcie,
enflammé par le vent d'or d'une joie de Chérubins,
je te dédie cette ode
venue du rivage lointain de ma jeunesse,
de ma jeunesse qui était ton esclave, ô Marisol,
et qui était un genre de jeunesse
que seuls connaissent ceux qui sont
à la fois troubadours et martyrs!


Or, ceux qui sont à la fois poètes et martyrs
reposent, après leur mort, aux jardins élyséens,
parmi les héros et les héroïnes
et chantent, en s'accompagnant d'une guitare d'ange,
les hymnes qui pacifient la terre des vivants!
Car seule la Beauté combat efficacement la Mort
qui hante le monde ainsi qu'une Méduse
aux ailes sombres, déployées au-dessus des mers
et des terres!


Cependant, j'écris l'ode présente,
au milieu d'une splendeur de Parousie
et alors que toute ma jeunesse défile
devant les yeux de mon âme,
comme en un rêve éveillé!
Et, si je fais ce rêve dominé par ta présence,
ô maîtresse de naguère,
c'est qu'hier, au crépuscule,
j'ai traversé une prairie pleine d'asphodèles
qui me replongea dans mes souvenirs!
Mais plus tard, j'ai bu l'oubli à une source
dont l'eau claire se mêla à mes larmes
versées sur notre amour passée!


Je te prie donc, ô unique dame de ma vie,
d'agréer cet hymne mien,
élevé en l'honneur de notre commune jeunesse!


LE JARDIN D'ESPAGNE

RECUEIL INEDIT. DU 22 AOUT AU 1ER SEPTEMBRE 2012