Hymne à la Déesse de Chypre
Dans Chypre, l'île marine odorante
aux belles demeures,
j'adore Aphrodite,
ma déesse
dont le temple paphien
aux cent autels
parfumés de tous les aromates d'Orient
est le résumé de mon histoire personnelle
et la somme de la science
la plus parfaite,
la science qui, à l'instar du pythagorisme,
est toute entière fondée
sur le Nombre d'or,
clé de l'orphique harmonie
et porte des grottes d'amour
où les nymphes s'unissent à Hermès,
dont la fille est l'Herméneutique,
de qui proviennent
toutes les disciplines d'exégèse
des textes sacrés
et tout l'Occultisme antique
et tout l'Esotérisme,
face intérieure et cachée
de la philosophie,
celle qui contient
l'âme secrète de toutes les doctrines!
Or, ces nymphes qui étreignent
le dieu du savoir
ne sont autres
que les jeunes femmes quasi-immortelles
qui hantent les grands arbres,
objet de notre vénération,
se nourrissent d'aliments divins,
dansent en rond
avec les déesses et les dieux
du mont Ida de Phrygie,
et vivent aussi longtemps
que les pins dont elles habitent
le feuillage de cime!
Cependant, ma déesse,
la sainte Aphrodite,
qui à ma naissance
fut portée par le vent chaud du Sud
au rivage de Chypre la Bienheureuse,
où les Grâces l'ont recueillie,
se fait entourer sa chair rose,
au préalable baignée dans la myrrhe
et les huiles essentielles,
d'un péplos couleur de feu auroral!
Car elle se prépare
à dormir ce soir
avec le prince-berger Anchise
dans le Troade aux mille remparts
et aux cent guerres,
et de cette union
jaillira le terrible Enée
dont la race gouvernera un jour
le monde,
d'abord à Troie,
puis en Sicile et en Epire,
et, enfin, à Rome,
en passant par Carthage,
ainsi que le chante
le grand Virgile,
l'un de mes maîtres!
Ô Astarté, ô Cythérée,
ô Cypris,
bénis tous les Chypriotes
qui en toi espèrent,
et accorde à ton poète
la grâce de toujours
pouvoir te chanter,
voire de mourir en chantant,
couronné des myrtes de ton culte
qui est la religion
de tous les aèdes
entourés des colombes de ta douceur
et de ton désir
jamais rassasié,
toujours prêt à de nouveaux sourires
préludant à des noces interminables
autant que variées,
à l'image de la diversité
des hommes et des lieux!
Et fais en sorte,ô déesse de la beauté,
blanche comme l'orge
ou comme le semoule de froment,
qu'Apollon-Soleil
m'accorde le laurier
du concours lyrique
qui se tiendra à Délos la brillante,
l'île de la Manifestation divine
et reine de l'Egée!
PELERIN DE L'AURORE
EDITIONS ENCRES VIVES. MARS 2005