Aux Filles des Cyclades


Ô filles des Grandes Cyclades,
et vous qui habitez depuis toujours
l'île sainte de Crète,
je vous chanterai
selon une inspiration
à moi venue des Dieux Immortels
en vous célébrant telles qu'en vous-mêmes,
telles qu'en vos âmes
semblables à des havres de corail,
à de blanches et hautes
falaises dominant l'Egée,
à des îles montagneuses et vertes
dont les pins descendent
par vagues successives
jusqu'à la mer,
et à des criques aux eaux transparentes
où il fait bon pour les femmes
d'y mirer leur vulve
pareille au volcan
qui ébranla jadis la Crète
jusque dans ses assises,
mit fin au règne minoen
et amena au pouvoir
la dynastie mycénienne!


Non, rassurez-vous,
je ne cherche point à vous complaire
en vous cajolant,
mais à réveiller en vous
par mes odes et par mes dithyrambes
les antiques gigantomachies
qui opposaient les chênes majestueux de Dodone,
par lesquels le Dieu Suprême
parle aux hommes,
aux lauriers oraculaires de Delphes,
manifestation d'Apollon,
le solaire cithariste,
les hauts hêtres de Macédoine
aux platanes d'or de Thessalie
et les palmes magnifiques
dont la semence est venue d'Egypte
et de Libye
aux plus puissants
des oliviers sauvages,
servant les uns et les autres
de refuges aux Déesses persécutées
qui voulaient accoucher à leur ombre
à l'insu d'Héra,
leur principale rivale,
comme elles fille de Rhéa,
la Mère Divine,
Génitrice des Déesses et des Dieux
de l'Hellade!


Comme je vous admire,
ô classiques, ô sobres beautés,
quand je vous vois escalader
les pentes de Santorin
sur des ânes bruns comme vous
qui parfois êtes
étonnamment fauves
ainsi que des lionnes,
mais qui, le plus souvent,
avez la couleur
des grands châtaigniers de Corse!


Et les chemins escarpés et abrupts
qui tant plaisent
à vos montures obstinées
de vous conduire vers vos maisons
blanches et bleues,
aux volets fermés,
vers vos demeures qui évoquent
les dés avec lesquels
les Parques jouent les humaines destinées
sur le damier d'un trictrac
vaste comme l'Univers!


Ô femmes à la tête de statue,
vous êtes aussi naturelles
qu'une pluie printanière
qui fait pousser les coquelicots
et fleurir les blés!


Et vos membres de neige
se devinent sous vos vêtements sombres
qui soulignent et mettent en valeur
la blancheur de votre peau
légèrement hâlée par le soleil!


Que jamais des coupables desseins
ne vous détournent
de votre azur immaculé en été!


Non, le ciel de Grèce ne tolère
ni l'indignité, ni l'impudence,
ni la Chimère furieuse,
ni le Rêve trompeur
de l'Utopie destructrice et meurtrière!


Car sous ce soleil
et sous cette lune
ne naissent que des songes véridiques,
que des rêves de la réalité!


L'OMBILIC INFIBULE

RECUEIL INEDIT. JUILLET 2005