La Morée de l'Amour


Ô belle de la Morée,
ta croupe est vaste
comme un chêne géant d'Arcadie
dont le coeur cinq vierges entrelacées
ne sauraient étreindre,
tant il est énorme!


Or, c'est dans ce chêne millénaire
que j'ai placé toutes mes espérances
d'une vie nouvelle
après la Résurrection
qui ne saurait tarder,
selon toutes les prophéties!


Ta tête, ton sein,
tes reins, tes cuisses, tes hanches
et tout ton corps
sont l'Eglise que j'ai épousée
en naissant!


Car cette dernière est faite
avant tout de chair,
et c'est d'abord la volupté sainte
qu'elle offre à l'homme bien constitué
et disposant de la santé mentale
nécessaire à l'accomplissement
des plus hauts travaux!


Sous le doux mûrier de la Révolution,
je dessine avec un calame de bronze,
muni à son bout
d'une plume d'oie,
tes délicieux contours
dont la jouissance intégrale
nécessiterait sept vies entières
et que de force,
que de volonté
et que de joie!


Ta hanche évoque les romans hellénistiques
et le monument de Laocoon:
elle en a le pathos
et toute la sinuosité tourbillonnante!
On dirait deux serpents qui dansent,
enroulés autour du roc mis à nu
de mon désir aventureux,
audacieux, téméraire,
tout en or et en gemmes!


Oui, mon désir est ce calame
avec lequel je dessine
tes courbes bien-aimées,
pareilles aux cimes superposées à l'infini
des montagnes de Grèce,
elles-mêmes tracées sur la mappemonde
par le calame de Dieu!


Ô ma bonne,
ma gracieuse,
ma libidineuse enfant,
sois la Morée de l'amour,
couchée à mes pieds,
sur un tapis en laine de brebis,
la hanche nue
entre deux serpents charmés,
cependant que le violon tsigane
chante ses mélodies
en bronze licencieux!


Crois-moi, la courbe de tes hanches
importe plus pour moi
qu'une couronne de palme
ceignant sur le tard
mon front d'athlète de l'esprit!


L'OLIVIER AU SANG BLEU

RECUEIL INEDIT. AOUT 2005