À une Beauté Céleste


Ô luth aux cordes de velours noir
et au parfum de cèdre,
ô fée, ô houri, ô péri,
les hommes qui ne n'ont pas vu encore
ignorentce qu'est la Beauté
et ceux qui te connaissent déjà
sont saisis de stupeur,
à chaque fois que tu apparais,
et, la tête renversée, boivent avec avidité
les rayons du soleil de ta face!


Or, si l'on pouvait convertir la Beauté en or,
les trésors du Grand Turc et du Grand Moghol réunis
ne suffiraient pas à acheter ta beauté!


À présent, tu te tiens debout,
au milieu de l'appartement de l'amour,
après avoir fait choir à tes pieds
ta toilette de brocart bleu,
brodé de fleurs
et d'où ton corps nu jaillit
comme un jet d'eau gracieux
de la vasque d'un patio de demeure seigneuriale,
à Ispahan!


Et je contemple ton pubis d'ébène,
cependant que des deux mains je saisis ta croupe,
semblable, soit à une faïence lustrée,
sur laquelle seraient peints des fruits opalescents,
soit à une piscine d'émail blanc
qui s'arrondirait au milieu d'un dallage noir,
soit enfin à un vase en cristal de roche,
dans lequel tremperait
une géante tulipe ou un lys monumental!


Puisses-tu, ô céleste Beauté,
recevoir avec joie
cet hymne que j'adresse à ton corps,
plus splendide que l'Étoile du Matin!


LEVRES DE TULIPE

RECUEIL INEDIT. DU 31 DEECEMBRE 2012 AU 10 JANVIER 2013