Le Verger de la Reine


J'étais jardinier dans le jardin de ma Bien-Aimée,
mais quand vint le temps de cueillir les roses,
cette Aimée capricieuse
fit appel à un jardinier autre que moi!
J'ai, de la sorte, semé sans récolter!


J'ai planté une vigne splendide
sur les bords du Douro,
mais quand le temps vint
d'en vendanger les fruits, si brillants sous le soleil,
un autre vendangeur est venu,
se substituant à moi, sur ordre de ma Reine
à l'esprit inconstant!
Les filles du Portugal sont-elles donc volages?
En effet, je croyais qu'autour
de la ville sainte de Coimbra,
à l'image et à la ressemblance
de l'admirable Inès de Castro,
fleurissait une race d'amoureuses
fidèles et constantes,
oui, une race d'amoureuses
très adorées par leurs amants,
en raison de leur constance!
Or, cette opinion mienne s'est avérée fausse!
La noble, la vaste Terre, entourée de la mer,
est-elle donc devenue un lieu de désolation?


Ah! Si ma maîtresse m'aimait
comme je l'aime,
je m'élèverais aussi haut que le Christ,
et, comme ce Maître Très Doux,
je mourrais sur la croix,
non du fait de mon amante,
mais à cause de la trahison d'un élève
qui m'aurait donné à mes ennemis!
Mais, au lieu d'être le Maître des âmes,
je suis devenu un amant pathétique,
cherchant à noyer sa douleur dans le vin
et la ruine de lui-même!


Dans ces conditions, comment ne pas pleurer
sur l'amour dont je fis preuve
à l'égard de la Reine de ma vie,
une amour plus magnificente
qu'un oiseau du paradis
et plus éloquente qu'un rossignol
dans la roseraie de l'Éden?


A L'OMBRE DE LA MADONE DE COIMBRA

RECUEIL INEDIT. DU 20 AU 29 MARS 2013