À l'Impératrice de la Lune
Ô la fureur de la jeunesse
qui tend les feuilles musculeuses
de ta croupe charnue
comme des arcs parthes ou scythes,
ô cette violence du jeune âge
qui répand autour de ta chair
l'arôme du défi amoureux,
la provocante haleine
des roses rouges
sur le point d'être butinées
par l'abeille ou le papillon du jour
et d'être chantées
par le fier rossignol de Mai!
Ô Rose mystique d'Iran,
ouvre-toi au brasier de ma bouche,
à moins que moi-même,
emporté par une ivresse bachique,
je ne force le passage
vers ton coeur vermeil,
à travers ton hymen!
Ô ma princesse barbare,
baignée de lumière maure,
ô ma reine d'Egypte,
ma voluptueuse Cléopâtre,
je te donnerai des festins
qui dureront jusqu'à l'aurore,
cependant que des plafonds d'ivoire
des fleurs tomberont sur nous!
Avec toi, je descendrai le Nil
dans une cange d'or
et je longerai la côte d'Egypte
jusqu'en Abyssinie
dans une nef fastueuse,
pourvue d'un pont supérieur
fait de pierres précieuses,
de cabines somptueuses
et d'une salle à manger
tournoyante comme le cosmos!
Oui, ensemble nous courrons
la mer des clavecins
à l'écume d'oeillets blancs!
Et, après avoir contourné
la péninsule arabique,
nous prendrons la route des Indes,
afin d'accomplir ainsi
notre destinée de nacre et de cobalt!
Vite, que l'on répande de l'ambre
dans les rues d'Alexandrie
et que le peuple t'offre
des gâteaux, des oiseaux,
des rubans et des brocarts!
Oui, qu'on offre le rêve
à toi, ma souveraine,
mon soleil pharaonique,
ma lune impériale!
FLEURS DE SOLSTICE
RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2005